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Entretien

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Des boues d'épuration au gaz de synthèse et au biochar: de nouvelles perspectives pour les petites villes

Le Dr Olivier Lepez, coordinateur de PYROCHAR, explique comment l'équipe du projet a mis au point une solution économique et à faible consommation d'énergie, capable de transformer les boues d'épuration des villes en biocharbon et en gaz de synthèse au moyen d'un procédé thermochimique.

La production de boues d'épuration issues des stations d'épuration européennes ne cesse d'augmenter, et elles terminent souvent à la décharge ou à l'incinérateur malgré les matières organiques et les nutriments qu'elles contiennent encore. Le projet PYROCHAR a développé une technique qui permettra aux communautés de moins de 10 000 habitants de valoriser ces boues, pour un coût bien inférieur à la mise à la décharge ou à l'incinération. Face à la menace de dégradation des terres arables d'Europe et aux efforts croissants de l'UE pour valoriser les boues issues des stations d'épuration, une solution permettant de produire à partir de ces boues des amendements utilisés par les agriculteurs serait particulièrement intéressante. Prenons le cas d'une ville de taille modeste n'ayant aucune usine de traitement des boues d'épuration à proximité. Le transport des boues jusqu'à l'incinérateur le plus proche est probablement trop coûteux et le déversement en décharge est une option de moins en moins prisée par les citoyens et les autorités européennes sensibles à la protection de l'environnement. Dans ce cas, il est encore plus urgent de trouver une solution alternative. Le projet PYROCHAR (PYROlysis based process to convert small WWTP sewage sludge into useful bioCHAR) est peut-être la réponse parfaite pour les villes de moins de 10 000 habitants. Depuis 2013, l'équipe du projet développe un processus économique et à faible consommation d'énergie, pour transformer les boues d'épuration des villes en biochar (ou biocharbon, du charbon issu d'un traitement par pyrolyse) et en gaz de synthèse au moyen d'un procédé thermochimique. Le Dr Olivier Lepez, président et PDG de l'ETIA et coordinateur de PYROCHAR explique comment cette technique permettra aux petites villes de gérer leur volume croissant de boues d'épuration tout en apportant aux agriculteurs une solution d'épandage gratuite. Selon vous, quels sont les principaux problèmes rencontrés par les petites villes en matière de traitement des boues produites par les stations d'épuration? Les communautés de moins de 10 000 habitants sont souvent confrontées au problème de l'éloignement des usines d'incinération des boues, qui entraîne des coûts élevés de transport et d'incinération. Elles finissent donc souvent par avoir recours à une solution de plus en plus problématique, consistant à mettre leurs boues à la décharge. Aujourd'hui, de nombreux pays interdisent cette pratique. Il est essentiel d'aider ces communautés à trouver une solution remplaçant la décharge et l'incinération coûteuse. En France, par exemple, on compte quelques 18 000 stations d'épuration, dont environ 93 % sont utilisées par les petites villes de moins de 10 000 habitants. Comment la solution de PYROCHAR aide-t-elle à résoudre ce problème ? PYROCHAR est une solution complète. Habituellement, la boue des stations d'épuration est traitée dans une centrifugeuse. La boue obtenue est constituée d'environ 80 % d'humidité et de 20 % de matière sèche, qui représente la seule biomasse produite. Dans la technologie PYROCHAR, la boue obtenue n'est que la première étape. Les villes de 10 000 habitants ont un débit de boue humide moyen d'environ 100 kw/h. Après séchage, cette boue donne de 20 à 22 kg de matière sèche, quantifiée au moyen d'un procédé de pyrolyse. Environ la moitié de cette boue est transformée en gaz de synthèse apportant 17 MJ/l3. Ensuite, ce gaz est brûlé pour produire de la valeur et apporter l'énergie nécessaire au séchage. D'un autre côté, nous pouvons aussi produire du biocharbon, qui selon les matières polluantes qu'il contient, peut être valorisé en amendement du sol ou en combustible solide. Existe-t-il d'autres possibilités pour valoriser le gaz de synthèse et le biocharbon produits par la solution PYROCHAR ? Il existe deux possibilités pour le gaz de synthèse. Outre la possibilité de produire de la vapeur utilisée pour le séchage, nous pouvons aussi utiliser le gaz de synthèse pour alimenter le moteur utilisé pour produire de l'électricité, au cas où le client possèderait déjà sa propre source d'énergie pour le séchage. Dans le cas du biocharbon, tout dépend du polluant. Les boues d'épuration peuvent être polluées par des métaux lourds, des produits pharmaceutiques ou des substances chimiques. Bien que la pyrolyse nous permette de créer un biocharbon totalement stérile (sans odeur ni agent pathogène) et dépourvu de toute molécule organique, il peut encore contenir des résidus de métaux lourds. Dans ce scénario, le biocarburant ne peut être utilisé dans l'agriculture, mais peut être brûlé: il continue alors d'apporter de 10 à 15 MJ/kg. Toutefois, rares sont les usines à déverser leurs déchets dans la station d'épuration utilisée par les petites villes, et les boues sont rarement polluées par des métaux lourds. Dans ce cas, le biocharbon fait un très bon engrais ou amendement du sol. D'un point de vue économique, ce type de solution est-il avantageux pour les petites villes? L'un de nos objectifs est de proposer un prix compétitif. Nous voulons fournir une solution coûtant de 50 à 60 euros par tonne de boue humide. Actuellement, la mise à la décharge coûte entre 60 et 80 euros la tonne et l'incinération de 100 à 200 euros la tonne selon le pays. Comment votre solution peut être utile aux agriculteurs? Devront-ils payer pour se procurer ce biocharbon? Cette solution offre une excellente opportunité pour les municipalités de faire un geste social envers leurs agriculteurs en leur permettant d'utiliser le biocharbon pour leurs exploitations, gratuitement ou pour un prix négocié. Cette décision dépend du modèle commercial et de la viabilité économique du système. Bien sûr, si la seule autre alternative pour la ville est d'incinérer les boues pour 200 euros la tonne, l'économie réalisée permet de proposer gratuitement le biocharbon aux exploitations agricoles. Par contre, si l'économie est limitée, la communauté pourra décider de vendre le biocharbon. Où en êtes-vous dans le développement du prototype? Nous avons presque achevé toutes les activités prévues. Il ne nous reste plus qu'à procéder à la démonstration du moteur utilisé avec le gaz de synthèse. Nous avons déjà procédé aux tests sur les séchoirs et avec la pyrolyse, et nous avons analysé le gaz de synthèse et le biocharbon. En août-septembre, nous associerons tous les composants. En septembre-octobre, nous procéderons aux tests finaux, notamment avec le moteur à gaz. Des petites villes vous ont-elles déjà fait part de leur intérêt? Nous n'avons pas commencé à faire la publicité de notre procédé et ne le ferons que lorsque nous disposerons de suffisamment de données, mais certaines petites villes commencent à être intéressées. Les activités de diffusion commenceront en octobre et devraient nous aider à évaluer le potentiel commercial de notre technologie. Que se passera-t-il une fois le projet terminé? Si tout fonctionne comme prévu, l'idée est de créer une installation de démonstration de plus grande envergure, et d'essayer de préparer un programme d'industrialisation et de commercialisation. Nous voudrions déposer une demande de financement Horizon 2020, mais seulement avec un prototype finalisé et déjà validé. Pour plus d'informations, veuillez consulter: PYROCHAR http://www.pyrochar.eu/

Pays

France

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