Étude des composants clés de demain pour le stockage de la chaleur à très haute température
Le stockage de l’énergie est un sujet d’actualité, l’UE étant en course pour atteindre l’objectif de 2030 d’un minimum de 27 % d’énergie renouvelable dans sa consommation finale. L’énergie solaire à concentration (ou CSP pour «concentrated solar power») est l’une des formes d’énergie renouvelable qui fait l’objet d’un intérêt accru, en particulier dans la feuille de route intégrée du plan SET. La CSP produit de l’électricité en concentrant les rayons du Soleil afin de chauffer un support, habituellement un liquide ou un gaz. Ce dernier est ensuite utilisé dans un procédé à moteur thermique (turbine vapeur ou au gaz) pour entraîner un générateur électrique. «Un moyen économique de stocker cette source d’énergie renouvelable variable est de la convertir en chaleur, de la stocker et de la convertir en électricité à la demande», remarque Alejandro Datas, coordinnateur scientifique du projet AMADEUS. Ce projet de recherche financé par l’UE a réalisé une évaluation du stockage et de la conversion de l’énergie à très haute température.
Soutenir l’énergie solaire
La plupart des systèmes de stockage de la chaleur stockent l’énergie dans des sels fondus, ou dans d’autres types de particules solides, à des températures maximales d’environ 560 °C. Ils emploient également des moteurs thermiques pour convertir cette chaleur en électricité. Cette technologie est largement utilisée au sein des centrales CSP, qui, en Europe, sont actuellement limitées à l’Espagne. On la retrouve également dans des solutions plus innovantes à batteries thermiques électriques ou de stockage d’électricité vers chaleur vers électricité (ou technologie PHPS pour «power-to-heat-to-power storage»), pour des applications de stockage d’électricité intégrées au réseau. Cependant, selon M. Datas, professeur adjoint en électronique et physique appliquée à l’Université polytechnique de Madrid (UPM), les systèmes actuels de stockage de la chaleur posent problème. Ils nécessitent d’énormes quantités de matériaux pour stocker une quantité importante d’énergie, c’est-à-dire environ 1 mètre cube de sels fondus pour stocker 100 kWh. De plus, ils sont particulièrement complexes en raison du besoin de transférer et de convertir l’énergie thermique en électricité: cela implique l’utilisation de fluides de transfert de chaleur et de pièces en mouvement (par ex., des pompes, des vannes, un moteur thermique, etc.), ce qui peut causer de sérieux problèmes de maintenance.
Aller plus loin que le silicium
Le silicium pourrait servir dans le cadre du stockage de l’énergie, car il peut en stocker d’énormes quantités (environ 1 200 kWh par mètre cube) lorsqu’il passe de l’état solide à liquide à 1 414 °C. Appelée «chaleur latente», il s’agit d’une forme d’énergie «cachée», fournie ou extraite uniquement pendant le changement de phase. «Le silicium a ses limites, notamment une dilatation de 10 % pendant la solidification. AMADEUS a donc étudié des matériaux et dispositifs de nouvelle génération permettant non seulement un stockage de chaleur plus dense énergétiquement et plus sûr, mais également une conversion plus efficace de l’énergie thermique vers électrique. Tout cela, sans utilisation de fluides de transfert de chaleur ou de pièces en mouvement», affirme M. Datas. Le projet a découvert que l’alliage eutectique de bore et de fer-silicium pourrait constituer un nouveau matériau à changement de phase (MCP) idéal. «L’alliage présente une chaleur latente élevée augmentant la densité énergétique du système. Il se dilate très peu lors de sa solidification et ne pourrait donc pas briser un conteneur. Par ailleurs, son point de fusion est moyen, en dessous de 1 200 °C», ajoute M. Datas. «Nous avons également ouvert la voie à une technologie radicalement nouvelle en matière de conversion de l’énergie thermique vers électrique, à travers un prototype fonctionnel de laboratoire d’un nouveau type de dispositif hybride thermoionique-photovoltaïque appelé TIPV», indique-t-il. En produisant de l’électricité à partir d’électrons et de photons, il convertit la chaleur à haute température directement en puissance énergétique très élevée. M. Datas conclut: «D’ici 2022, nous pourrions disposer de prototypes industriels fonctionnels de cette technologie, pour un usage destiné au stockage de l’énergie thermique à chaleur latente (LHTES), mais un soutien financier et réglementaire sera nécessaire.»
Mots‑clés
AMADEUS, conversion, stockage de l’énergie thermique à chaleur latente, LHTES, matériau à changement de phase, MCP, stockage, température, convertisseur thermoionique-photovoltaïque, TIPV