Les sursauts radio nous aident à percer le mystère de l’origine des rayons cosmiques
L’origine des rayons cosmiques – des particules chargées qui se déplacent à une vitesse proche de celle de la lumière – constitue l’un des plus grands mystères de l’astronomie. Alors que la lumière parvient aux astronomes plus ou moins en ligne droite depuis sa source, les rayons cosmiques sont déviés par les champs magnétiques, ce qui brouille leurs traces. Le projet LOFAR, financé par l’UE, a mis au point une nouvelle méthode permettant d’observer les rayons cosmiques à l’aide d’un radiotélescope et d’en apprendre davantage à leur sujet. Tous les rayons cosmiques ne «naissent» pas égaux, et ceux qui nous parviennent possèdent une vaste gamme d’énergies liées à leur masse et à leur vitesse. Les particules de plus faible énergie, de l’ordre de 10^15 eV, pourraient provenir des restes de supernovae situés au cœur de la Voie lactée, où les particules «surfent» sur les pourtours d’étoiles en train d’exploser, prenant progressivement de la vitesse. Mais il n’existe aucun mécanisme connu au sein de notre galaxie qui puisse accélérer les particules jusqu’aux très hautes énergies parfois observées, ce qui laisse supposer une origine extragalactique. «Il est possible que les restes de supernovae extrêmement puissantes produisent des énergies 100 fois supérieures à 10^15 eV, mais au-delà, il est difficile, théoriquement, de trouver des sources capables de produire de telles énergies», explique Stijn Buitink, coordinateur du projet.
Des visiteurs extraterrestres venus de loin
Identifier le niveau d’énergie précis à partir duquel les rayons cosmiques commencent à être dominés par des sources extragalactiques aidera les astronomes à reconstituer les conditions probables dans lesquelles ils sont produits. Pour y parvenir, il leur faut effectuer de nombreuses mesures, mais l’observation des rayons cosmiques reste difficile. Ils frappent la Terre au rythme d’une particule de 10^15 eV par kilomètre carré et par an, ce qui rend les détecteurs installés au sol inefficaces. De manière plus générale, les astronomes étudient la faible fluorescence créée lorsque les rayons cosmiques pénètrent dans l’atmosphère et entrent en collision avec les molécules d’air, mais cela ne peut se faire que lors de nuits très sombres. Stijn Buitink et son équipe de la VUB, en Belgique, ont utilisé une nouvelle technique identifiant les particules cosmiques à partir de l’impulsion radio qu’elles émettent lorsqu’elles se heurtent à l’atmosphère terrestre. «Ces sursauts sont très courts, de l’ordre de quelques dizaines de nanosecondes», ajoute Stijn Buitink. Les signaux ont été détectés par LOFAR, un réseau de 20 000 petites antennes radio situées aux Pays-Bas. Pour distinguer les brefs éclats radioélectriques des sources d’origine humaine, telles que les bougies d’allumage des moteurs de voiture, LOFAR utilise des détecteurs de particules qui captent la pluie de particules secondaires résultant d’une collision de rayons cosmiques dans la haute atmosphère. «Avec LOFAR, nous avons démontré qu’il était possible de surveiller les rayons cosmiques de façon très précise dans le domaine radio, avec la même précision que les techniques traditionnelles», explique Stijn Buitink. Cette nouvelle technique leur permettra d’observer les rayons cosmiques dans n’importe quelles conditions d’éclairage et sur une vaste portion de ciel.
Des métaux lourds
Les rayons cosmiques plus lourds, composés par exemple de fer ou de plomb, pénètrent plus profondément dans l’atmosphère. En localisant la source du sursaut radio, Stijn Buitink et son équipe ont donc pu déterminer l’élément constitutif des rayons cosmiques détectés, ainsi que leur niveau d’énergie. Il subsiste toutefois un léger décalage entre les résultats provenant de LOFAR et ceux obtenus en se basant sur la fluorescence de l’air. «Soit il y a quelque chose que nous ne comprenons pas au niveau des mesures, soit il s’agit d’un phénomène physique intéressant», fait remarquer Stijn Buitink. «En tout cas, nous pouvons déjà affirmer que LOFAR a permis de recueillir de nouvelles mesures basées sur une technologie complètement différente, avec des incertitudes différentes.» Il est désormais prévu de mettre à niveau LOFAR, afin qu’il puisse fonctionner en continu et générer des données cruciales. Stijn Buitink envisage également d’utiliser le Square Kilometre Array (SKA), actuellement en construction en Australie, afin d’observer les rayons cosmiques avec une précision encore plus grande.
Mots‑clés
LOFAR, rayons cosmiques, particule chargée, sursaut radio, télescope, supernovae, source d’énergie, particules secondaires