European Commission logo
français français
CORDIS - Résultats de la recherche de l’UE
CORDIS

Article Category

Actualités
Contenu archivé le 2023-03-02

Article available in the following languages:

Elémentaire, mon cher Einstein

Un consortium réunissant des chercheurs suisses, américains et russes est parvenu à démontrer l'existence de deux nouveaux éléments artificiels au célèbre Centre russe de recherche nucléaire (JNIR) de Dubna (Russie). Non encore baptisés, ils possèdent les numéros atomiques 115...

Un consortium réunissant des chercheurs suisses, américains et russes est parvenu à démontrer l'existence de deux nouveaux éléments artificiels au célèbre Centre russe de recherche nucléaire (JNIR) de Dubna (Russie). Non encore baptisés, ils possèdent les numéros atomiques 115 et 113 et constituent les 20e et 21e nouveaux éléments découverts depuis le plutonium en 1940. Le Dr Heinz Gäggeler, de l'Institut Paul Scherrer (IPS), en Suisse, a conduit l'équipe helvétique, dont le rôle a été crucial dans la démonstration visant à corroborer l'existence des nouveaux éléments. Ces derniers avaient été observés auparavant, sans que leur existence ait pu être prouvée jusqu'à présent. "La spécificité de cette découverte était qu'elle impliquait de nouvelles trouvailles relatives aux éléments. Lors de cette nouvelle expérience, nous avons fabriqué l'élément 115, qui ne se désintègre pas en un élément connu mais en un isotope inconnu lorsqu'il est soumis à un rayonnement alpha. Nous étions d'avis que l'élément 115 se désintégrerait en 113, qui se transmuerait lui-même en 111, puis ainsi de suite, en 109 et en 107, jusqu'à aboutir au 105. Notre problème consistait à le démontrer", a déclaré H. Gäggeler à CORDIS Nouvelles. L'expérience a consisté à bombarder un disque rotatif d'atomes d'américium 243 (le numéro atomique de l'américium est 95) avec un faisceau d'ions calcium 48 (le numéro atomique du calcium est 20) dans un accélérateur à particules. "Le calcium 48 est un matériau très exotique. Il coûte plusieurs milliers d'euros au milligramme, et il nous en fallait plusieurs grammes pour réaliser notre expérience", a commenté H. Gäggeler. L'équipe espérait que les noyaux fusionneraient pour produire un nouvel élément - de numéro atomique 115. Si cela se produisait effectivement, les atomes d'élément 115 découverts seraient capturés par un disque de cuivre situé derrière le disque d'américium. Un grand nombre d'éléments artificiels lourds sont extrêmement instables et tendent à se désintégrer lorsqu'ils sont soumis à un rayonnement alpha. Le rayonnement alpha comprend deux neutrons et deux protons, liés en un seul paquet. Facilement détectable, ce type de rayonnement est capital pour réunir les preuves dont l'équipe avait besoin. En supposant que la théorie de l'équipe soit correcte, l'élément 115 se désintégrerait sous l'effet d'un rayonnement alpha en 113, puis - soumis de nouveau au même rayonnement - poursuivrait encore et encore sa désintégration, très rapidement, jusqu'à ce que soit atteint l'élément 105, qui est relativement stable. Le problème sur lequel butait l'équipe était le test de présence de l'élément 115, dans la mesure où il n'existe que durant une fraction de seconde et qu'il en va de même de tous les éléments jusqu'au 105, qui subsiste durant plusieurs heures. C'est là qu'intervenait l'équipe dirigée par H. Gäggeler, dont le savoir-faire a permis aux savants de tester aisément la présence de l'élément 105: "Nous avons pour cela utilisé une astuce chimique. Notre contribution consistait à détecter l'élément 105, appelé dubnium. Nous connaissions chimiquement le 105 de par nos travaux sur un isotope 105 distinct et étions parfaitement rompus sur le plan de la préparation chimique." "Nous en sommes arrivés à découvrir un nouvel élément et avions anticipé le résultat, sans avoir cependant aucune certitude", a déclaré H. Gäggeler. "En conclusion, nous avons trouvé 15 atomes de dubnium - une très petite quantité." Malgré l'infime quantité, la présence de dubnium constituait une preuve suffisante pour l'équipe. En dénombrant le nombre de particules alpha émises, l'équipe a pu reconstituer le scénario à l'envers, depuis le dubnium pour aboutir aux éléments 115 et 113. Coïncidence: le dubnium tire son nom de la ville russe de Dubna, où ces recherches avaient été menées. Bien que l'existence de ces deux nouveaux éléments ait été prouvée, ils ne sont malheureusement pas encore éligibles au "baptême". Les noms sont attribués par l'Union internationale de chimie pure et appliquée et l'Union internationale de physique pure et appliquée. "C'est à elles qu'il appartient de déterminer quand un nouvel élément a été identifié, puis répliqué. La reproduction de nos résultats par le Japon, l'Europe ou l'Amérique pourrait prendre dix ans. Ces pays sont les seuls à disposer des accélérateurs adéquats", a déclaré H. Gäggeler. "Nous sommes convaincus que nos résultats sont corrects; il ne s'agit donc que d'une question de temps." Lorsque l'expérience aura été reproduite, l'équipe aura le privilège de baptiser les nouveaux éléments.

Pays

Suisse, Russie, États-Unis

Articles connexes