La cartographie tridimensionnelle pour lutter contre le cancer
Une équipe de scientifiques financée par l'UE a apporté de nouvelles informations sur la structure tridimensionnelle d'une protéine essentielle à la prévention du cancer. La protéine en question, Mps1, joue un rôle prépondérant dans la régulation du nombre de chromosomes au cours de la division cellulaire. C'est cette fonction qui la rend si importante dans la lutte contre le cancer. Selon les chercheurs, basés à l'université de Manchester au Royaume-Uni, ces travaux de recherche pourraient mener au développement de nouveaux traitements oncologiques plus sûrs, mais également plus efficaces. Leurs résultats sont publiés dans la dernière édition de la revue Journal of Biological Chemistry. Le Dr Lydia Tabernero, l'une des co-auteurs de l'article, s'avoue très satisfaite des résultats obtenus par l'équipe. «Ces travaux présentent la première structure cristallographique de la protéine humaine Mps1, un régulateur de stabilité chromosomique se révélant être une cible potentielle dans le traitement contre le cancer», commente-t-elle. «Nos recherches ont mis en exergue les caractéristiques structurelles importantes de la protéine ainsi que de nouveaux sites de fixations pouvant être exploités pour le développement d'inhibiteurs de Mps1 spécifiques.» Mps1 appartient à la famille de protéines appelées kinases. Le cancer se déclenche lors du dérèglement d'un des substrats de ces enzymes. En conséquence, il est indispensable de bien comprendre le fonctionnement des kinases pour lutter efficacement contre le cancer. Jusqu'à présent, on a associé environ 100 kinases (sur 500) à l'apparition du cancer. Malheureusement, les scientifiques n'ont réussi à cartographier la structure tridimensionnelle que pour quelques-unes d'entre elles. Une bonne connaissance de la structure de l'enzyme est essentielle en vue de concevoir de nouveaux inhibiteurs de kinases pouvant être utilisés en tant qu'agents thérapeutiques. Cela constitue un domaine de haute importante dans l'industrie pharmaceutique. À l'heure actuelle, plus d'une centaine de protéines kinases sont soumises à des tests cliniques. L'équipe s'est intéressée à Mps1 car elle agit en quelque sorte comme un point de contrôle pour les cellules, qui l'utilisent pour stimuler un tri précis des chromosomes au cours de la division cellulaire. Mps1 permet d'éviter une aneuploïdie (une cellule qui ne possède pas le nombre normal de chromosomes), processus que l'on associe au cancer. «Mps1 constitue une cible logique en raison de son rôle majeur dans la prévention de l'aneuploïdie», explique le professeur Patrick Eyers de l'université de Manchester et responsable de l'étude. «Nous voulions voir ce à quoi ressemblait cette protéine au niveau moléculaire, et en découvrant le site de fixation actif, permettre le développement d'un nouvel inhibiteur clé pouvant bloquer physiquement le site de fixation de l'adénosine triphosphate (ATP)». Le professeur Eyers et son équipe ont utilisé le synchrotron «Diamond Light» dans leurs travaux. Ce «super microscope» permet l'accélération d'électrons dans une énorme chambre en forme d'anneau de la taille de cinq terrains de football. Les électrons sont accélérés jusqu'à ce qu'ils émettent de petites particules à haute énergie. Les rayons X pointaient vers un échantillon de protéine pur. Ainsi, les chercheurs ont pu «observer» pour la première fois la structure anatomique de la protéine. «Seules les structures cristallographiques de quelques kinases clés sont actuellement connues; l'aventure ne fait que commencer», commente le professeur Eyers. «La communauté scientifique place de grands espoirs dans le développement de traitements oncologiques 'antimitotiques' innovants faisant appel à la méthode de conception de médicaments basée sur la structure.» L'UE a apporté son soutien à cette étude dans le cadre du projet PTPNET («Protein tyrosine phosphatases: structure, regulation and biological function»), financé par une bourse Marie Curie du réseau de formation pour la recherche du sixième programme-cadre (6e PC).
Pays
Royaume-Uni