Révélation des mécanismes métaboliques chez les blattes
Une équipe de chercheurs d'Espagne partiellement financés par l'UE vient de découvrir de nouvelles informations permettant de mieux comprendre la physiologie des blattes. Leurs résultats ont été publiés dans la revue à accès libre Public Library of Science (PLoS) Genetics, et pourraient à terme contribuer au développement de nouvelles stratégies pour le contrôle de ces insectes nuisibles. En plus des subventions octroyées par le gouvernement espagnol, une partie du financement provient du projet CRAB («Combating resistance to antibiotics»), soutenu au titre du domaine thématique «Sciences de la vie, génomique et biotechnologie pour la santé» du sixième programme-cadre (6e PC). Le projet TARPOL («Targeting environmental pollution with engineered microbial systems a la carte») du septième programme-cadre (7e PC) a également apporté son soutien. Les scientifiques décrivent la séquence génomique de la souche de Blattabacterium Bge de la blatte allemande (Blatella germanica). Cet endosymbiote (un organisme qui vit à l'intérieur d'un autre organisme symbiotique) qui vit dans des cellules spécialisées se trouvant dans la graisse abdominale des blattes est à l'origine de l'élimination de l'excès d'azote dans le corps des insectes par un processus d'émissions d'ammoniac. Le métabolisme de Blattabacterium «utilise un mécanisme qui semble inefficace: les enzymes bactériennes synthétisent, par le biais d'un processus qui demande une grande dépense d'énergie, et détruisent simultanément la même molécule, l'urée», explique l'un des responsables de l'équipe de recherche, le Dr Amparo Latorre de l'université de Valence en Espagne. L'urée est indispensable à l'élimination de l'excès d'azote dans le métabolisme de nombreux organismes, principalement éliminé par excrétion urinaire. Elle est synthétisée dans le corps de nombreux organismes par l'oxydation des acides aminés ou par l'ammoniac. Chez la blatte allemande, c'est l'endosymbiote qui se charge de ce cycle. Des processus semblables sont bien connus dans le monde des insectes. «Les endosymbiotes bactériens des insectes jouent un rôle primordial dans l'amélioration du régime alimentaire de leurs hôtes», peut-on lire dans l'étude. «Dans certains cas, tels que chez les aphis et les mouches tsé-tsé, les endosymbiotes complètent la capacité métabolique des hôtes ayant un régime pauvre en nutriments, et les bactéries hébergées par les fourmis charpentières omnivores participent au recyclage de l'azote.» Il en va de même pour la Blattabacterium chez les blattes. Les chercheurs ont cependant découvert que les blattes et les fourmis charpentières avaient sans doute développé ce mécanisme métabolique remarquablement identique par le biais de voies évolutives totalement indépendantes; en effet, les deux bactéries endosymbiotiques appartiennent à deux lignées bactériennes très éloignées. «Il s'agit d'un exemple intéressant de la convergence évolutive de deux endosymbiotes qui appartiennent à des phylums [groupements] bactériens très différents et ayant développé un ensemble de fonctions similaires en fonction de leur hôte», poursuit l'article. Le Dr Latorre conclut qu'«il est indispensable d'approfondir nos connaissances sur les mécanismes évolutifs à l'origine des associations symbiotiques entre les insectes et les bactéries, non seulement pour mieux comprendre la physiologie fondamentale et le comportement de l'hôte, mais également pour concevoir de nouvelles stratégies permettant de lutter contre ces parasites».
Pays
Espagne