Une analyse à la pointe de la technologie débouche sur un liant pour béton révolutionnaire
Le ciment est essentiellement utilisé comme liant pour le béton, le matériau le plus abondamment utilisé dans le monde après l’eau. Il est littéralement le pilier de notre vie quotidienne. Cependant, sa production engloutit d’énormes quantités d’énergie et de ressources naturelles, et génère jusqu’à 8 %(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) de toutes les émissions de la planète. Fort du soutien du programme Actions Marie Skłodowska-Curie, le projet GeoDust(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) a mis au point un moyen de produire des substituts au béton en utilisant un sous-produit de la production de ciment, ce qui entraîne la réduction concomitante de la demande en ciment et des émissions associées à la production.
La poussière «bypassée» de four à ciment en tant qu’activateur alcalin d’un nouveau liant pour béton
Le ciment Portland, le ciment le plus utilisé dans le monde, est fabriqué en chauffant des matières premières à des températures supérieures à 1 400 ºC. Une partie des gaz émis par le four est éliminée au moyen d’un «bypass», ce qui permet de prolonger la durée de vie du four et d’améliorer la qualité du produit. Après refroidissement, il reste de la poussière «bypassée» de four à ciment (CBPD pour «cement kiln bypass dust»). La CBPD contient des métaux alcalins, en particulier du chlorure de potassium, ce qui en fait un «activateur» potentiel de matériaux alcali-activés. Ces matériaux, également appelés «géopolymères», ne datent pas d’hier. Ils sont généralement créés à partir de sous-produits industriels (précurseurs), et leur utilisation pour produire un matériau de type ciment fait l’objet de recherches intensives ces dernières décennies. Cependant, au vu de la pléthore de précurseurs, d’activateurs, de doses et de conditions de durcissement qui peuvent être utilisés, le large éventail de propriétés des produits ainsi créés n’a pas été caractérisé correctement.
Caractérisation de la chaîne CBPD-béton: de la microstructure aux performances macroscopiques
L’équipe a adopté des approches à la pointe de la technologie pour caractériser la complexité de la CBPD. Par exemple, la microscopie électronique à balayage leur a permis de voir la taille, la forme et la composition chimique des particules (grâce à un code couleur correspondant à l’élément chimique). La variabilité de la composition de la CBPD au sein d’une même cimenterie d’un jour à l’autre s’est révélée plus importante que prévu, ce qui a entraîné une variabilité importante des propriétés du liant. L’une des raisons pour lesquelles l’équipe a jeté son dévolu sur la CBPD était sa capacité présumée à limiter le coefficient de retrait élevé des matériaux alcali-activés. Les scientifiques ont constaté, à leur grand étonnement, que les variations de volume sont très sensibles à la dose de CBPD et aux conditions de durcissement. Dans certains cas, l’expansion était telle qu’elle détruisait le béton. «Le projet GeoDust nous a permis de comprendre le rôle de la CBPD dans les liants à base de laitiers(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) alcali-activés. Nous avons acquis de nouvelles connaissances sur des phénomènes allant des réactions chimiques et de la microstructure aux performances macroscopiques du béton définitif», explique Vlastimil Bílek de l’université des technologies de Brno(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), qui a assuré la coordination du projet. Cette démarche a abouti au développement réussi d’un liant robuste. GeoDust a publié ses résultats sur le rôle bénéfique de la CBPD dans le processus d’activation alcaline et sur la capacité d’atténuation du retrait des liants alcali-activés. De surcroît, le projet a publié des résultats sur la préparation des liants alcali-activés 100 % à base de matériaux recyclés et sur l’excellente durabilité des bétons alcali-activés à base de CBPD.
Des liants de béton durables et un patrimoine humain
Et Vlastimil Bílek de résumer: «Si les liants inorganiques ne cristallisent pas l’attention du public comme le font les nanotechnologies ou la biomédecine, ils sont toutefois omniprésents, ont une incidence sur notre quotidien et sur l’environnement et se montrent très difficiles à caractériser. Notre projet a apporté sa pierre à l’édifice, en améliorant la durabilité du béton.» Doctorant au début du projet, Vlastimil Bílek est désormais titulaire d’un doctorat et achève son premier projet de recherche dont il est le chercheur principal. En sus des avantages techniques et environnementaux qu’il procure, GeoDust a contribué à la compétitivité mondiale du milieu universitaire et de la sphère industrielle de l’Europe en assurant la formation des chercheurs en début de carrière, dont Vlastimil Bílek.