De nouvelles approches pour aborder le problème des bactéries résistantes aux antibiotiques
Les antibiotiques ne sont pas uniquement utilisés pour traiter les infections simples. Les interventions médicales plus complexes, telles que la chimiothérapie, les greffes d’organes et la chirurgie cardiaque, dépendent également fortement de l’efficacité de ces médicaments. «Il est crucial que nous fassions bon usage des antibiotiques dont nous disposons», explique la coordinatrice du projet ChronosAntibiotics, Mariana Pinho de l’université NOVA de Lisbonne au Portugal. «Avec le temps, les bactéries acquièrent une incroyable capacité à développer une résistance à pratiquement tous les antibiotiques.» C’est l’une des raisons pour lesquelles le développement de nouveaux antibiotiques est si complexe et coûteux. Un nouveau médicament prometteur pourrait en effet rapidement devenir obsolète en raison de cette résistance. Les sociétés pharmaceutiques décident que la réalisation d’essais cliniques longs et coûteux pour de nombreuses nouvelles molécules n’en vaut tout simplement pas la peine.
Nouvelles méthodes efficaces de criblage des antimicrobiens
Le projet ChronosAntibiotics, soutenu par le Conseil européen de la recherche, a voulu répondre à ce défi clinique par une approche en deux volets. Son premier objectif consistait à mieux comprendre la division des bactéries. L’équipe du projet s’est concentrée sur la bactérie Staphylococcus aureus (S. aureus), un pathogène clinique. «Si nous comprenons la manière dont un agent pathogène se divise, nous pouvons commencer à réfléchir à de nouveaux moyens d’empêcher sa division durant une infection», ajoute Mariana Pinho. Le projet a commencé par le criblage de S. aureus mutants par microscopie à fluorescence et par le recours à l’apprentissage automatique pour analyser automatiquement les cellules. «Cela nous a permis de déterminer le stade du cycle cellulaire de dizaines de milliers de cellules et d’identifier des mutants spécifiques qui sont déficients dans la progression du cycle cellulaire», explique Mariana Pinho. «Nous avons ensuite étudié le rôle biologique des protéines manquantes dans chaque mutant. Nous avons découvert de nouveaux mécanismes de régulation du cycle cellulaire, ainsi que des protéines jusqu’alors inconnues, indispensables à la ségrégation correcte des chromosomes. Ces éléments sont essentiels à la survie des bactéries dans un hôte infecté.»
Analyser les composés inhibant la croissance bactérienne
Le deuxième objectif du projet consistait à développer des méthodes plus efficaces de criblage des composés antimicrobiens, sur la base d’une meilleure compréhension des processus cellulaires bactériens. L’équipe a développé des souches bactériennes qui deviennent fluorescentes en présence de composés conçus pour inhiber la croissance bactérienne. «Nous voulions concevoir des souches qui réagissent à la présence d’une certaine classe d’antibiotiques ou à l’inhibition d’une voie métabolique que nous pourrions vouloir cibler», explique Mariana Pinho. «Cela peut inclure l’inhibition de la synthèse de la paroi cellulaire, de la biosynthèse des acides gras ou de la synthèse de l’ADN.» Mariana Pinho et son équipe pensent que ces souches bactériennes pourraient permettre un criblage et une étude plus efficaces de potentiels nouveaux antibiotiques.
Appréhender la biologie des agents pathogènes
Mariana Pinho estime que, dans le cadre du premier volet, le projet a apporté une contribution précieuse à un domaine essentiel des soins de santé cliniques. «En savoir plus sur la biologie des agents pathogènes est toujours utile», confie-t-elle. «Je ne peux pas être certaine que nos résultats accéléreront directement la découverte d’antibiotiques. Cependant, si nous n’essayons pas de mieux comprendre ces organismes, nous limiterons notre capacité à développer de nouvelles stratégies antimicrobiennes.» Concernant le deuxième volet, Mariana Pinho fait remarquer que la technologie de criblage doit encore être optimisée. Elle espère néanmoins que cette innovation contribuera à la découverte de nouveaux composés antimicrobiens. «Les nouveaux scientifiques formés dans le cadre de ce projet constitueront un autre héritage à long terme de ce dernier», ajoute-t-elle. «Nous espérons qu’ils poursuivront leurs recherches sur ce sujet et qu’ils finiront par diriger leurs propres laboratoires.»
Mots‑clés
ChronosAntibiotics, bactéries, biologie, médicaments, antimicrobiens, antibiotiques