Une analyse affinée des carottes de glace alimente la science du climat
Les carottes de glace sont la seule ressource directe disponible pour étudier les événements climatiques du passé. Les particules piégées dans les fines couches de glace apportent des indices sur les transformations atmosphériques survenues lors des premiers changements brutaux du climat (CBC). Ces informations sont essentielles à la compréhension des tendances actuelles du réchauffement planétaire. L’objectif du projet MICRO-CLIMATE(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), entrepris avec le soutien du programme Actions Marie Skłodowska-Curie (MSCA)(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), était de coupler deux techniques d’analyse innovantes pour mieux comprendre ce que les carottes de glace ont à nous apprendre. Les systèmes de spectrométrie de masse à plasma à couplage inductif par ablation laser (LA-ICP-MS) ont fourni les outils nécessaires: L’un, équipé d’une grande cellule cryogénique unique, est situé à l’Institut du changement climatique dans le Maine et l’autre, destiné à la cartographie à haute résolution des impuretés 2D dans la glace, se trouve à l’université Ca’ Foscari de Venise.
Plein feux sur les événements de Dansgaard-Oeschger
Des événements de type CBC se sont produits tout au long de l’histoire géologique, mais les mécanismes sous-jacents ne sont pas entièrement compris. Il est largement admis qu’une transition du CBC est en cours et que nulle part sur la planète le réchauffement climatique ne s’accélère aussi rapidement que dans l’Arctique. MICRO-CLIMATE a concentré ses recherches sur les archives des glaces arctiques du Groenland, qui conservent des données remontant à 115 000 ans. Les données suggèrent que des fluctuations climatiques rapides, caractérisées par des événements Dansgaard-Oeschger(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), se sont produites des dizaines de fois au cours de la dernière période glaciaire. Les carottes de glace conservent des traces des fluctuations climatiques sous forme de particules atmosphériques. En étudiant ces particules dans les fines couches de glace qui représentent les événements CBC, MICRO-CLIMATE entend comprendre quelles composantes du climat ont changé en premier et lesquelles ont changé plus tard. «Comprendre comment les interactions entre la glace et les impuretés peuvent perturber les signaux climatiques archivés dans la glace très amincie, a été crucial. La carotte de glace du Groenland que nous avons analysée dans le cadre de MICRO-CLIMATE présentait des couches très amincies et constituait donc un bon terrain d’essai», explique Pascal Bohleber, coordinateur du projet.
Deux techniques pour une plus grande résolution
La destruction de l’échantillon et l’impossibilité d’obtenir une analyse à haute résolution sont les principaux inconvénients des techniques conventionnelles d’analyse des carottes de glace. MICRO-CLIMATE a réuni la spectroscopie cryo-Raman et la LA-ICP-MS, comme décrit dans le journal «Geochemistry, Geophysics, Geosystems»(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), pour surmonter ces problèmes. La LA-ICP-MS propose une approche microdestructive et à haute résolution, mais les erreurs d’interprétation ne sont pas rares. Pour les éviter, il convient étudier la manière dont les impuretés interagissent avec la matrice du cristal de glace. Les systèmes complémentaires utilisés dans le cadre du projet ont permis de répondre à cette préoccupation. Le système LA-ICP-MS du Maine a permis de traiter des échantillons de glace d’une longueur allant jusqu’à un mètre. Le système utilisé à Venise a permis d’obtenir une cartographie 2D à haute résolution de l’emplacement des impuretés incrustées dans la glace. L’utilisation consécutive des deux systèmes s’est avérée fructueuse, selon Pascal Bohleber, car ils ont tous deux trouvé les mêmes signaux dans la glace. «Nous avons également investi dans des tests d’étalonnage de nos signaux, et ces techniques d’étalonnage sont encore toujours utilisées par les deux laboratoires aujourd’hui», explique-t-il. En intégrant les forces de deux centres de recherche, MICRO-CLIMATE ouvre la voie à des études fructueuses. Le projet s’est achevé un an plus tôt que prévu, car le boursier du MSCA a reçu une subvention de consolidation(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) du Conseil européen de la recherche. Cela a retardé la publication de toutes les données recueillies au cours du projet, mais a permis de mener une enquête plus détaillée sur un événement individuel du CBC. Et, comme le dit Pascal Bohleber, «la bonne nouvelle, c’est que, comme la LA-ICP-MS est micro-destructrice, la glace est toujours là et nous continuerons à l’analyser».