Une production d’hydrogène propre inspirée des plantes
L’hydrogène a le potentiel de révolutionner la matrice énergétique de l’Europe, de fournir une énergie propre et de réduire la dépendance du continent à l’égard des combustibles fossiles. Néanmoins, plus de 95 % des méthodes actuelles de production d’hydrogène génèrent de grandes quantités de gaz à effet de serre, ce qui signifie que l’hydrogène n’est pas encore propre. Dans le cadre du projet CLEANH2, financé par le Conseil européen de la recherche(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), des chercheurs se sont inspirés de la photosynthèse des plantes pour développer de nouvelles méthodes plus propres de production d’hydrogène. L’équipe de CLEANH2, dirigée par Nicolas Boscher(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) de l’Institut luxembourgeois des sciences et technologies, a conçu une gamme de polymères qui imitent le processus de photosynthèse, craquant l’eau pour obtenir de l’hydrogène propre. «Depuis plus de 3 milliards d’années, la nature procède au craquage de l’eau à l’aide de la lumière du soleil», explique Nicolas Boscher, coordinateur du projet CLEANH2. «La photo-électrolyse de l’eau, également connue sous le nom de photosynthèse artificielle, utilise la lumière pour diviser les molécules d’H2O en H2 et O2», explique-t-il.
Créer des polymères photosynthétiques
Pour leur nouvelle génération de polymères séparateurs d’eau, l’équipe s’est tournée vers des molécules connues sous le nom de métalloporphyrines, des composés parents de la chlorophylle photosynthétique que l’on trouve dans les plantes. Les métalloporphyrines sont d’excellents candidats pour le craquage de l’eau car elles peuvent facilement passer d’un état d’oxydation à un autre pour déclencher des réactions électrochimiques et produire de l’hydrogène. Pour créer leurs nouveaux photocatalyseurs polymères, les chercheurs ont attaché ensemble des métalloporphyrines (polymérisées). Les polymères ainsi obtenus peuvent absorber la lumière et la convertir en énergie, puis permettre des réactions électrochimiques pour créer de l’hydrogène. «La liaison conjuguée covalente formée entre les métalloporphyrines au cours de leur polymérisation assure un effet coopératif entre celles-ci, facilitant le transfert de charges et renforçant l’activité catalytique», explique Nicolas Boscher. La création de tels polymères n’est toutefois pas aisée. La synthèse et l’utilisation pratique des polymères à base de métalloporphyrine sont limitées par le fait qu’ils ne dissolvent difficilement dans les liquides. L’équipe a donc adopté une approche différente, opérant lorsque les composés sont à l’état gazeux. Grâce à sa nouvelle approche, les chercheurs ont pu produire une série de nouveaux polymères, directement synthétisés sous forme de minces films. Les chercheurs pourraient ainsi facilement étudier leur capacité à craquer l’eau et à produire de l’hydrogène.
Explorer d’autres procédés catalytiques
«Les métalloporphyrinoïdes ont été sélectionnés par la nature pour remplir de nombreuses réactions catalytiques importantes: la photosynthèse par les chlorophylles, la respiration par les cytochromes, la vitamine B12 impliquée dans le métabolisme», souligne Nicolas Boscher. «La capacité de concevoir avec précision les propriétés des minces couches de polymères à base de métalloporphyrine, telles que celles obtenues dans le cadre du projet CLEANH2, ouvre la voie à l’étude d’autres processus catalytiques importants.» Les chercheurs vont à présent s’appuyer sur ces résultats pour concevoir des catalyseurs polymères à base de métalloporphyrine afin de convertir la lumière du soleil et des molécules de base simples en carburant ou en produits chimiques avancés. Ils ont déjà conçu et développé de tels catalyseurs pour la conversion sélective et à haut rendement des nitrates, présents dans de nombreux flux de déchets, en ammoniac.
Révolutionner la capacité de l’Europe à produire de l’hydrogène propre
L’objectif est de synthétiser des produits chimiques encore plus avancés, un travail actuellement soutenu par un financement Horizon dans le cadre du projet SUN2CN, que Nicolas Boscher coordonne également. Ce projet entend développer un dispositif Solar-to-X autonome permettant de convertir des molécules simples et peu énergétiques présentes dans les flux de déchets en produits chimiques de valeur à base de carbone et d’azote (C-N), en utilisant la lumière du soleil comme seule source d’énergie. «Les produits chimiques C-N, tels que l’urée et la méthylamine, essentiels pour l’agriculture et l’industrie pharmaceutique, contribuent grandement à la santé humaine et à la qualité de vie», explique Nicolas Boscher. «En cas de succès, le nouveau dispositif éliminera le besoin de ressources fossiles et de production d’ammoniac à forte intensité énergétique», ajoute-t-il. «SUN2CN entend révolutionner les secteurs de la chimie et de l’énergie.»