Un nouveau matériau révolutionnaire
Alors que les allotropes de carbone sp2 et sp3 sont respectivement bien connus comme le graphite et le diamant, une lacune importante dans la science du carbone reste à combler. «Les allotropes de carbone hybridés sp sont la pièce manquante du puzzle du carbone», explique Carlo Casari(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), physicien au département de l’énergie de l’université polytechnique de Milan(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) (Polimi). Les allotropes du carbone sont des formes structurelles différentes de l’élément carbone, les allotropes du carbone hybridés sp ayant des structures de chaînes linéaires ou polyatomiques où les atomes de carbone sont liés par une alternance de liaisons triples et simples. Selon Carlo Casari, des avancées récentes ont fondamentalement transformé la compréhension qu’a la science de ces structures insaisissables. «Les scientifiques ont non seulement découvert des systèmes carbone sp naturels, mais ils ont également réussi à créer de nouvelles structures, comblant ainsi une lacune importante dans les nanomatériaux à base de carbone», explique-t-il. L’une de ces percées est le graphyne amorphe (AGY pour «amorphous graphyne»), un nouveau matériau de carbone à base de sp développé par le projet SCCAMC(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), financé par l’UE.
Une membrane de carbone hybride appelée graphyne amorphe
Pour parvenir à l’AGY, le projet soutenu par le programme Actions Marie Skłodowska-Curie(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) (AMSC) a commencé par stabiliser le carbone hybridé sp et par explorer sa synthèse et ses applications fonctionnelles. Yifan Zhang, boursier AMSC du projet, a ensuite mis au point des méthodes chimiques et physiques pour produire efficacement des fils atomiques de carbone appelés polyynes. «Le carbone hybridé sous forme de chaînes ou de fils représente le nec plus ultra des nanostructures de carbone unidimensionnelles avec des propriétés prédites exceptionnelles», note Carlo Casari, chercheur principal du projet. Pour synthétiser le polyyne, les chercheurs ont mis au point un procédé modifié de décharge à arc pulsé capable de recycler le solvant, ce qui permet de réduire le recours à des ressources chimiques de 80 %. «Nous avons utilisé une technique de synthèse interfaciale liquide-liquide à température ambiante qui transforme ces polyynes en membranes de carbone amorphe sp2-sp stables, de la taille d’une plaquette, que nous avons appelées graphyne amorphe», fait remarquer Yifan Zhang. Le projet a aussi démontré que le matériau AGY traité thermiquement a des performances électrocatalytiques et présente une activité de réaction de réduction de l’oxygène (ORR pour «oxygen reduction reaction») en tant que catalyseur sans métal. L’ORR est une réaction chimique au cours de laquelle l’oxygène gagne des électrons et est réduit, généralement en eau ou en peroxyde d’hydrogène. Il s’agit d’un processus essentiel dans les systèmes de conversion énergétique tels que les piles à combustible.
Un catalyseur sans métal pour des solutions énergétiques durables
En démontrant le potentiel d’AGY en tant que catalyseur ORR sans métal, le projet SCCAMC a contribué au développement de solutions énergétiques durables. Il a également ouvert la voie à une pile à combustible sans métaux précieux. «Tout comme le graphène a révolutionné la science des matériaux et la nanotechnologie, nous espérons que notre matériau innovant, synthétisé à température ambiante, trouvera sa place dans les laboratoires et les applications du monde entier, révolutionnant à terme l’électronique flexible, les capteurs avancés et les catalyseurs verts», conclut Yifan Zhang.