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Success stories de projets - les systèmes multi-robots au service des pompiers

Dans un entrepôt en feu, les pompiers sont confrontés à la fumée, aux flammes et à d'autres dangers, qui sont autant d'obstacles à leur intervention. Mais avec l'aide d'un ensemble de robots autonomes spécialement conçus pour leurs opérations de recherche et de secours, ils pourraient se déplacer avec davantage de rapidité et de sécurité. Ils pourraient même sauver davantage de vies.

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À chaque fois qu'il pénètre dans un entrepôt en flammes, le pompier met sa vie en danger. La fumée est extrêmement toxique et la visibilité très réduite. Sa bouteille d'oxygène a environ 20 minutes d'autonomie, et généralement il ne parcourt que 12 mètres par minute à cause des obstacles. Il a donc un champ d'action maximal de 120 mètres, alors qu'un entrepôt fait en moyenne 400 mètres sur 200 mètres. Les pompiers de la brigade South Yorkshire Fire and Rescue au Royaume-Uni ont expliqué aux chercheurs les problèmes particuliers que leur posent ces entrepôts industriels. La surface importante et la fumée dense rendent tout déplacement particulièrement difficile et très dangereux. Bien des pompiers ont perdu la vie dans des entrepôts en feu. Ils sont facilement désorientés par l'absence quasi-totale de visibilité et risquent de se perdre. Face à ce constat, le projet Guardians («Group of unmanned assistant robots deployed in aggregative navigation supported by scent detection»), financé par l'UE, a réalisé un groupe de robots autonomes spécialement conçus pour aider les pompiers à explorer de grands entrepôts. En matière de robotique, la notion de systèmes multi-robots (ou robots en essaims) s'appuie sur des recherches de pointe en simulant un groupe d'oiseaux en vol. Le projet est parti de ce concept pour que le déplacement de ses robots autonomes soit influencé par leur répartition dans le local. «À ma connaissance, nous sommes parmi les premiers à tester des systèmes multi-robots en situation réelle», déclare Jacques Penders, coordinateur du projet Guardians. «L'objectif est de parvenir à ce que les robots coopèrent pour agir par groupes, petits ou grands». Pour les pompiers, chaque seconde compte. À Worcester (Massachussetts, États-Unis), six pompiers sont morts en s'égarant dans un entrepôt de six étages. La communication a été rompue en raison des murs en béton, des armatures et des étagères métalliques. D'autres tragédies du même type sont également survenues en Europe. L'essaim de robots conçu par le projet Guardians doit donc pouvoir échanger des informations utiles de guidage et les communiquer aux sauveteurs, dans des conditions extrêmes. Les chercheurs ont donc été conduits à concevoir et tester des interfaces capables de ne présenter que les informations les plus cruciales pour guider les pompiers, et dans des conditions que les robots pourraient supporter. Lorsqu'il pénètre dans un entrepôt, le pompier commence par longer un mur. Ce mur est son point de référence. Ce n'est que dans de très rares occasions que les équipes de secours vont s'en éloigner, car la fumée devient progressivement plus épaisse. «Plus on s'éloigne des murs, plus la fumée est dense», lit-on dans la documentation du projet. La plupart des robots de détection, tels que caméras et télémètres laser, ne fonctionnent pas toujours correctement dans des conditions difficiles. Les entrepôts peuvent comporter des étagères métalliques, portant éventuellement des produits dans des emballages métalliques tels que boîtes de conserve ou des bidons. Cet environnement métallique complexe interfère avec les ondes radio, et les particules présentes dans la fumée diffusent les lasers. «Généralement, les pompiers disposent d'un plan du bâtiment dans lequel il s'apprêtent à pénétrer. À l'intérieur, ils comptent leurs pas pour se repérer. Les robots utilisent le même système», déclare M. Penders. Le premier robot se positionne à l'entrée et sert de balise. Il reste à la même place tout au long de l'intervention. Le second robot longe le mur, le troisième robot devient le dernier sommet d'un triangle équilatéral. D'autres robots avancent alors, utilisant un pavage triangulaire de nœuds et des lignes de communication entre les nœuds relais. Les robots communiquent entre eux par un réseau sans fil. «La fumée gêne les détecteurs lumineux généralement utilisés», ajoute M. Penders. «C'est pourquoi nous utilisons les micro-ondes». À mesure que les robots avancent dans le bâtiment, ils mettent un place une grille qui devient une véritable carte de métriques en deux dimensions, et ils utilisent un comportement de mise en réseau pour maintenir et étendre les communications. Si un robot s'éloigne du groupe et perd le signal, il retourne à un point prédéfini ou à la dernière position où il avait un signal sans fil suffisant. Il peut aussi continuer d'avancer, en supposant qu'il finira probablement par retrouver l'un des autres robots de l'essaim. Les chercheurs du projet voulaient aussi que les robots aident activement les pompiers pendant l'intervention. L'essaim doit donc être capable d'interagir directement et de façon cohérente avec les pompiers, et d'indiquer la direction à suivre. À la base, le système multi-robots réagit de manière autonome aux mouvements d'un sauveteur. Lorsqu'il se déplace, le groupe de robots en fait de même. Sachant que les pompiers subissent déjà une forte pression mentale et physique, le système de robots ne doit en aucun cas être une contrainte supplémentaire ni distraire leur attention. Il doit seulement les soutenir dans leur mission de recherche et de sauvetage. Les chercheurs devaient donc veiller à ce que les robots réagissent de façon appropriée et logique, et créer une interface qui aide les pompiers à garder leur orientation. La plupart des opérations de recherche et de secours qui utilisent des robots sont dirigées par une personne qui reste hors de la zone de danger. Le projet Guardians est unique car il établit une coopération entre l'homme et plusieurs robots, directement sur le site d'intervention. Il exige pour cela une interface innovante permettant d'interagir avec le système de robots sans effort supplémentaire. De plus, au vu des conditions difficiles, les pompiers ne peuvent pas s'en remettre uniquement à leurs sens ni même aux technologies audiovisuelles habituelles. Pour surmonter ces difficultés, les chercheurs ont conçu une interface qui utilise un système visuel installé dans le casque du pompier. Ils travaillent sur la mise au point d'une interface tactile qui pourra être placée sur le corps du pompier. Le projet Guardians a conçu et réalisé deux types de visières. Ils ont été testés par le South Yorkshire Fire and Rescue, afin que les chercheurs puissent apporter des modifications et améliorer les performances. Ceci a toutefois nécessité de nombreux essais par tâtonnement, en raison de la méfiance initiale des pompiers face aux appareils. «L'intégration d'un système multi-robots avec l'homme s'est avéré difficile mais intéressante. L'objectif à long terme est cependant de gagner la confiance de l'homme, car les signaux peuvent parfois être source de distraction», déclare M. Penders. «Nous devons réfléchir à la façon dont les pompiers peuvent utiliser ce système». Tout d'abord, l'interface doit présenter de façon visuelle les données rassemblées par le groupe de robots. Elle utilise pour cela un ensemble de LED RGB à l'intérieur de la visière. De son côté, le pompier doit avoir une confiance totale dans l'exactitude des informations. On comprend bien que peu d'entre eux s'éloignent le cœur léger d'un mur ou d'un point de repère, au vu des risques qu'ils courent. La première visière testée indiquait la direction à la fois la plus sûre et la plus judicieuse. Au cours du test, on a demandé aux pompiers d'effectuer une opération classique de recherche et de sauvetage. Ils devaient aussi effectuer quelques tâches supplémentaires, notamment indiquer verbalement leur progression au coordinateur et au reste de l'équipe. Les résultats ont montré que les pompiers ne tenaient pas toujours compte des signaux de direction indiqués dans leur visière. Les sauveteurs ont indiqué aux chercheurs que les données d'orientation affichées dans la visière devaient être plus simples et sans ambiguïté. La seconde visière a été montée sur un casque opérationnel. Outre l'affichage des LED, les chercheurs ont installé un appareil de mesure interne (IMU - internal measurement unit) capable de détecter l'orientation prise par le pompier lorsqu'il suivait les commandes. Comme pour le premier test, les pompiers ont dû effectuer un certain nombre d'activités. Mais alors que les informations d'orientation étaient initialement mises à jour en permanence, le second test fournissait moins de commandes. L'extérieur des visières était opacifié afin que le chef d'équipe soit obligé de se fier aux signaux pour se déplacer. Un second pompier, lui aussi en aveugle, devait alors suivre le leader, conformément à la procédure standard de recherche et de sauvetage. Tous deux étaient attachés à une corde. Les pompiers devaient aussi compter le nombre de fois que deux voyants de couleurs différentes s'allumaient dans leur visière. Ces voyants avaient pour but de générer un stress supplémentaire. Les pompiers ont quand même pu suivre les commandes de leur leader. Le projet a posé les bases d'une recherche prometteuse, associant des technologies de pointe avec des techniques d'avant-garde en matière de systèmes multi-robots. Les robots conçus par le projet Guardians peuvent aussi avertir les pompiers de la présence de substances chimiques toxiques dans l'air, et conviennent pour d'autres types de sinistres. Grâce aux algorithmes développés par le projet, les robots suivent le pompier sans aucune communication. C'est cette autonomie qui démarque le projet Guardians, avec le transfert d'informations grâce aux visières spéciales. «Nous avons procédé à une démonstration finale avec le South Yorkshire Fire and Rescue», déclare M. Penders. «Ils ont confirmé que l'utilisation de robots pouvait être utile dans des situations à haut risque». Le projet Guardian a été financé au titre du thème «Technologies de l'information et de la communication» du sixième programme-cadre (6e PC) de l'UE.