Une étude sur les protéines cible les cultures fruitières résistantes aux infections fongiques
Botrytis cinerea et Monilinia fructicola sont deux espèces de champignons responsables de moisissures post-récolte et de détérioration de produits agricoles. Le Botrytis est connu pour détruire les fraises avant même que les consommateurs puissent les goûter, ce champignon faisant également pourrir les raisins, les kiwis, les tomates, les poivrons et la laitue. Le Monilinia provoque quant à lui la moisissure des fruits à noyaux, tels que les pêches, les nectarines, les cerises, les abricots et les amandes. Les répercussions économiques de l’action de Botrytis et de Monilinia se chiffreraient à plus de 2 milliards d’euros de pertes par an. Le secteur agricole se tourne progressivement vers des alternatives aux fongicides chimiques pour lutter contre ces parasites. Cela est en partie dû aux inquiétudes environnementales, mais également au fait que la résistance aux infections fongiques implique l’inefficacité progressive des sprays chimiques utilisés. «Élever des cultures résistantes aux champignons est une possibilité, mais cela constitue un défi dans la mesure où l’infection dépend de nombreux facteurs génétiques et environnementaux», explique Jan van Kan, coordinateur du projet européen NECROFUNGI et professeur adjoint au laboratoire de phytopathologie de l’Université de Wageningen, aux Pays-Bas. «La maturation du fruit affecte également sa prédisposition à l’infection, et les propriétés peuvent évoluer rapidement lors des tests d’infection. Cela signifie qu’il est très difficile d’obtenir des résultats d’infection reproductibles.»
Cibler des protéines fongiques
Le projet NECROFUNGI a souhaité répondre à ces défis en se focalisant sur la fonction biologique des protéines. Le Botrytis et le Monilinia produisent et excrètent des protéines durant l’infection, qui aident le champignon à attaquer la plante hôte. «Nous savions qu’en identifiant les protéines qui jouent un rôle dans les infections, nous serions en mesure de les exploiter à des fins d’élevage et de sélection», indique Jan van Kan. «Notre hypothèse de travail était que les réponses de la plante à des protéines pures seraient plus prédictives, facilitant l’élevage et la sélection de plantes résistantes aux champignons.» Les recherches ont été entreprises avec le soutien du programme Actions Marie Skłodowska-Curie. Cela a permis à la chercheuse espagnole Laura Vilanova Torren, spécialiste en interactions pathogènes post-récolte, de travailler avec Jan van Kan à Wageningen.
Des récoltes sans pesticide
Après être parvenue à séquencer le génome de Monilinia fructicola (le génome de Botrytis avait déjà pu être séquencé), l’équipe a pu identifier les protéines excrétées par les champignons. Celles-ci ont par la suite été produites en laboratoire à l’aide d’une levure. «L’assemblage rapide et l’annotation précise de la séquence de génome de Monilinia ont été des composantes essentielles de notre réussite», ajoute Jan va Kan. «De plus, nous sommes parvenus à développer un test d’infection en laboratoire pour Monilinia sur des feuilles détachées de pêche. Cela nous a permis d’obtenir des infections reproductibles, de manière plus efficace que ce que nous aurions pu réaliser dans un environnement de type verger.» Jan van Kan remarque que les travaux avec des cultures saisonnières telles que la pêche ou l’abricot restent un réel défi, dans la mesure où les feuilles ou les fruits eux-mêmes ne sont disponibles que trois ou quatre mois dans l’année pour mener des expériences. Néanmoins, il est désormais possible de s’appuyer sur la réussite du projet NECROFUNGI, non seulement à l’Université de Wageningen, mais également au sein du centre de recherche IRTA Lleida, en Espagne. Suite à la finalisation du projet, Laura Vilanova Torren a obtenu un poste à cet institut, où elle continuera son travail sur Monilinia. Son objectif est de générer des connaissances biologiques supplémentaires et de mettre au point des protéines fongiques capables de favoriser la résistance des cultures telles que les pêches, les abricots et les nectarines. «Plusieurs projets en cours à l’Université de Wageningen adoptent des approches similaires concernant d’autres espèces de Botrytis, l’une d’elles infectant l’oignon et une autre le lys», remarque Jan van Kan. En définitive, Jan van Kan espère que les connaissances biologiques obtenues par l’intermédiaire du projet NECROFUNGI aideront les entreprises de sélection végétale à mettre au point des plants résistants aux infections fongiques. «Il faudra plusieurs années voire des décennies pour parvenir à cet objectif», indique-t-il. «Il s’agit néanmoins d’une des seules stratégies à notre disposition pour réduire l’utilisation de pesticides visant à contrôler les maladies post-récolte présentes depuis des décennies comme Monilinia, voire des millénaires dans le cas de Botrytis.»
Mots‑clés
NECROFUNGI, fruit, culture, fongique, Botrytis, Monilinia, pesticides, fongicides, récolte, agricole, protéines, biologique