Modéliser l’empreinte mécanique du glioblastome multiforme
Le GBM est le sous‑type malin de gliome le plus fréquent et est associé à un sombre pronostic. Il démontre une grande hétérogénéité en termes de caractéristiques biologiques et de phénotypes de croissance macroscopiques, allant des tumeurs nodulaires aux limites bien formées, en passant par les tumeurs de degrés variables d’infiltration des tissus sains. La croissance du GBM cause souvent une compression du tissu environnant et induit un stress mécanique, ce qui augmente la pression intracrânienne et altère la fonction neurologique. Dans le même temps, cela déclenche des changements dans le microenvironnement de la tumeur qui renforcent l’agressivité du GBM.
Modéliser la croissance du GBM
Le projet GlimS visait à étudier le rôle des forces biomécaniques générées par la croissance du GBM. Pour ce faire, des scientifiques ont élaboré un cadre pour estimer les caractéristiques de la tumeur à partir d’un seul ensemble de données IRM préopératoires. Cette recherche a été entreprise avec le soutien du programme Marie Skłodowska-Curie (MSC) à l’Université de Berne en Suisse en collaboration avec l’Institut de recherche Beckman aux États-Unis. «J’ai employé la modélisation inverse pour estimer les caractéristiques de croissance macroscopique du GBM à partir de l’imagerie par RM clinique de routine», explique Daniel Abler. Daniel Abler a travaillé en supposant que la croissance d’infiltration du GBM peut être décrite mathématiquement comme un processus de réaction‑diffusion et qu’une hausse de la concentration cellulaire de la tumeur locale résulte en une croissance volumétrique qui induit à son tour des contraintes mécaniques dans le tissu. La mesure des caractéristiques de la croissance du GBM s’est avérée complexe car l’anatomie cérébrale saine du patient — avant invasion de la tumeur — est généralement inconnue. Au moment du diagnostic, l’impact mécanique de la tumeur appelé medicine (effet de masse) pourrait déjà avoir déformé les structures cérébrales. Ainsi, Daniel Abler a reconstruit l’évolution passée de la tumeur dans le cerveau du patient à partir d’images obtenues au moment du diagnostic.
Mettre à l’épreuve le cadre de modélisation GlimS
L’équipe scientifique a appliqué l’approche de modélisation inverse développée aux images préopératoires de patients diagnostiqués d’un GBM afin d’obtenir des estimations spécifiques aux patients des paramètres de la croissance tumorale. Ils ont ensuite comparé la forme simulée de la tumeur, la distribution cellulaire tumorale et simulé la déformation tissulaire avec une évaluation IRM préopératoire. Selon Daniel Abler, «cette approche de modélisation inverse nous a permis de distinguer différentes zones tumorales, d’approcher les limites des tumeurs et de reproduire qualitativement la déformation des tissus sains induite par la tumeur». Fait important, l’approche GlimS offre des informations supplémentaires indisponibles à partir de l’IRM: En simulant la croissance du GBM, elle fournit des estimations résolues sur le plan spatial de la densité cellulaire de la tumeur et des contraintes mécaniques induites par la tumeur. L’outil GlimS permet une qualification détaillée non invasive des forces biomécaniques macroscopiques agissant durant la croissance de la tumeur. D’un point de vue fondamental, cela permettra de mieux comprendre les conséquences cliniques de ces forces induites par les tumeurs, et de poursuivre les recherches sur le rôle des phénotypes de croissance distincts du GBM pour les résultats cliniques. Les activités futures de l’équipe GlimS incluent la corrélation des caractéristiques de croissance prédites par le modèle avec les données cliniques, ouvrant ainsi la voie à l’identification de biomarqueurs du GBM mécaniquement informés. Étant donné le pronostic extrêmement mauvais du GBM, ces biomarqueurs pourraient aider à mieux stratifier les patients et à prendre des décisions relatives au traitement davantage éclairées.
Mots‑clés
GlimS, GBM, IRM, modélisation inverse, glioblastome multiforme, croissance tumorale, cancer du cerveau, forces biomécaniques, contrainte mécanique, biomarqueurs pronostiques