Comprendre le rôle potentiel des champignons dans la production de biodiesel
Alors que le monde cherche à réduire sa dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles, le biodiesel a émergé comme une alternative abordable, fiable et durable. En réalité, selon la World Bioenergy Association (WBA), plus de 41 milliards de litres de biodiesel ont été produits en 2018. Pourtant, en raison de ses coûts de production élevés, le biodiesel est loin de pouvoir rivaliser avec les carburants diesel fossiles. «Le problème est qu’au moins 10 % du produit final obtenu par le processus traditionnel de production de biodiesel est un sous-produit de faible valeur appelé glycérol brut», explique An Phan, chercheuse à l’Institut de microbiologie appliquée, qui fait partie de l’université RWTH d’Aix-la-Chapelle. «Nous avons besoin de nouvelles solutions capables de convertir ce glycérol brut en un produit économiquement viable.» Une solution potentielle recourt aux Ustilaginaceae, un type de champignons qui a démontré sa capacité à utiliser le glycérol brut pour produire des produits chimiques industriels. Avec le soutien du projet Meta-Origami, financé par l’UE, An Phan, une titulaire d’une bourse Marie Skłodowska-Curie, entend mieux comprendre ce potentiel.
Des résultats importants atteints
Selon An Phan, les champignons Ustilaginaceae sont uniques en ce sens qu’ils peuvent se développer sous forme haploïde et unicellulaire, ce qui leur confère un avantage de taille dans les applications industrielles. Prenons par exemple Ustilago trichophora, une espèce particulière de champignon Ustilaginaceae. «Si nous pouvons éliminer la quantité de carbone perdue durant sa culture, cette espèce pourrait devenir un candidat idéal dans la production de malate industriel, un facteur clé dans la valorisation du glycérol brut», explique An Phan. Toutefois, le défi à relever aujourd’hui est le manque d’informations sur le réseau métabolique et sa fonction pour les espèces d’Ustilaginaceae — et c’est là qu’intervient le projet Meta-Origami. «L’une des principales motivations de ce projet était de mieux comprendre le potentiel d’Ustilaginaceae à utiliser la biomasse non alimentaire ou les flux de déchets bio-industriels comme substrat pour produire des composés pertinents pour l’industrie», ajoute An Phan. Le projet a déjà atteint quelques résultats importants, dont beaucoup ont permis de mieux comprendre l’utilisation d’U. trichophora dans la production de produits chimiques précieux à partir de glycérol. Ils comprennent, par exemple, la mise en place d’un cadre général pour améliorer la souche d’U. trichophora en utilisant des approches métabolomiques. Grâce à ce cadre, les chercheurs ont pu extraire des informations biochimiques fondamentales à partir de métabolites intracellulaires et extracellulaires et les utiliser pour améliorer la production de malate. «Nos résultats ont mis l’accent sur l’utilisation biotechnologique d’Ustilaginaceae, ce qui favorisera également le transfert de connaissances entre les pays européens et dans le monde», souligne An Phan.
Contribuer à une société plus durable
Le biodiesel est une technologie clé générique pour le développement industriel en Europe. Selon la WBA, près de 15,7 milliards de litres de biodiesel, représentant 37,5 % de la production mondiale de biodiesel, ont été produits en Europe en 2018. En améliorant la production d’acide malique, le projet Meta-Origami apporte de la valeur à l’industrie européenne du biodiesel, rendant l’affinage global du biodiesel plus compétitif d’un point de vue écologique et économique. «Nos idées pour utiliser des sources non fossiles et non alimentaires influenceront positivement l’acceptation du concept par la société et encourageront le développement d’une véritable bioéconomie», conclut An Phan. «Ensemble, ces avantages scientifiques, sociaux, environnementaux et économiques contribueront à une société plus durable, et permettront de préserver et créer des emplois, et de diminuer la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles.»
Mots‑clés
Meta-Origami, champignon, biodiesel, combustibles fossiles, durable, bioénergie, diesel, glycérol brut, produits chimiques industriels, bioéconomie