Vers un théorème structurel des mineurs de graphes orientés
Les graphes sont des structures mathématiques qui peuvent faire office de modèles simples pour décrire les phénomènes du monde réel, et ils sont fréquemment utilisés pour concevoir des algorithmes contrôlant toute une variété d’applications. Sachant que les graphes se présentent sous des formes et des tailles diverses, la théorie de la structure algorithmique des graphes identifie les structures les plus aptes à améliorer la vitesse et l’efficacité des calculs. «Il est bien établi que les graphes en forme d’arbre permettent une résolution algorithmique efficace des problèmes mathématiques. Mais qu’en est-il des autres structures?», s’interroge Stephan Kreutzer, coordinateur du projet DISTRUCT basé à l’université technique de Berlin, qui a accueilli ce projet financé par le Conseil européen de la recherche. Il existe une distinction entre deux types de graphes, intimement liée à leur fonction: ces derniers peuvent être en effet orientés ou non orientés. Dans un graphe non orienté, une ligne, appelée arête, peut être tracée pour relier deux points appelés sommets, qui sont ainsi reliés de manière bidirectionnelle. Dans un graphe orienté, cette ligne s’apparente en général plutôt à une flèche, la relation entre les points étant de nature unidirectionnelle. Si les sommets représentent des gares et les arêtes des voies, les graphes non orientés peuvent être utilisés pour les algorithmes de planification qui optimisent les itinéraires des trains. Mais pour les algorithmes de gestion de la chaîne d’approvisionnement, où les sommets représentent les composants du produit qui doivent être assemblés avant que l’étape suivante ne puisse débuter, les graphes orientés s’avèrent plus appropriés. Une autre caractéristique structurelle est liée au fait qu’un graphe puisse être considéré comme exempt de la présence de certains «mineurs» (de graphe), dits «mineurs exclus». Ce terme désigne des sous-structures formées à partir d’un graphe en supprimant des arêtes et des sommets, puis en contractant certaines arêtes. Ils revêtent une importance cruciale dans les algorithmes, car le fait de pouvoir procéder à des interpolations à partir d’une structure centrale, pour créer des structures plus petites, augmente considérablement la gamme de problèmes auxquels un algorithme peut être appliqué. Étant donné que l’existence de mineurs exclus avait déjà été démontrée dans les structures de graphes non orientés, le projet DISTRUCT s’est intéressé aux mineurs dans les graphes orientés. «La théorie des mineurs n’existait pas vraiment pour les graphes orientés. Il y avait certes des définitions, mais pas d’efforts de recherche ciblés, ce qui est surprenant compte tenu des milliers d’articles publiés au sujet des mineurs dans les graphes non orientés», explique Stephan Kreutzer. «Nos résultats contribuent à imposer la théorie structurelle des mineurs de graphes orientés en tant que domaine indépendant et émergent.»
De nouvelles techniques algorithmiques découlant des graphes orientés
Alors que les graphes non orientés comportant des mineurs exclus avaient été caractérisés par la théorie structurelle, ce qui avait abouti au théorème des mineurs de graphe, connu sous le nom de conjecture de Wagner, aucun travail comparable n’avait été effectué pour les graphes orientés. Mais pour caractériser le théorème structurel des mineurs de graphes non orientés, il fallait d’abord franchir un certain nombre d’étapes intermédiaires, en particulier celles du «théorème d’exclusion de grilles», du «théorème du mur plat» et du «théorème de décomposition des enchevêtrements». «Nous savions qu’il serait impossible de démontrer le théorème complet dans le cadre du projet DISTRUCT. Même ces étapes intermédiaires semblaient décourageantes. Nos résultats les plus importants concernent donc des versions orientées des étapes intermédiaires qui ont abouti au théorème non orienté. Il s’agit en l’occurrence des travaux concernant notre théorème du mur plat orienté et la notre décomposition des arbres enchevêtrés orientés», explique Stephan Kreutzer. Chacun de ces théorèmes intermédiaires présente un intérêt pour des approches innovantes en matière de conception d’algorithmes. Le théorème du mur plat affirme par exemple qu’un graphe orienté s’apparente à un arbre, ou contient une sous-structure plate comme une grille carrée, ou une sous-structure dense connue sous le nom de clique. L’identification de la structure aide les programmeurs à concevoir l’algorithme le plus approprié. L’équipe a découvert que les versions orientées de ces théorèmes intermédiaires étaient différentes des versions non orientées préexistantes, et a donc dû mettre au point de nouvelles techniques de calcul. «Nos résultats permettent de concevoir des techniques algorithmiques pour les graphes orientés qui n’étaient pas envisageables auparavant», indique Stephan Kreutzer. «En tant que modèle mathématique fondamental, il est utile pour un large éventail d’applications et de domaines de recherche, allant des sciences sociales aux sciences naturelles.» L’équipe s’efforce désormais de démontrer le théorème structurel complet pour les mineurs de graphes orientés.
Mots‑clés
DISTRUCT, graphe orienté, graphe non orienté, algorithme, théorie structurelle des graphes, mineur de graphe, mathématiques