Les cosmologistes se préparent pour une mission sur l’énergie noire
Notre compréhension du cosmos est une odyssée de découvertes perpétuelles. Pendant des années, le consensus a été que l’expansion de l’univers devait ralentir. Ce n’est qu’à la fin des années 1990 que les scientifiques ont pu confirmer que le phénomène était exactement inverse, l’expansion de l’univers s’accélère. «Les scientifiques ont appelé énergie noire(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) la force à l’origine de l’expansion de l’univers», explique Thomas Kitching, coordinateur du projet EWC(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), du University College London(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) au Royaume-Uni. «Cependant, nous ne savons toujours pas exactement de quoi il s’agit.» La matière noire est une autre partie intégrante de ce modèle d’univers en expansion. «Lorsque nous observons l’univers, nous “percevons” quelque chose d’invisible et de transparent à la lumière, et nous savons que cette chose est bien là à cause de son effet gravitationnel», explique Thomas Kitching. En d’autres termes, sans l’existence de l’énergie noire et de la matière noire, le comportement des planètes, des étoiles et des galaxies n’aurait tout simplement aucun sens.
Découvrir l’énergie noire
Ces découvertes ont bouleversé la cosmologie. La mission Euclid(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) de l’Agence spatiale européenne(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), qui lancera un télescope dans l’espace, a pour ambition de trouver des réponses. «Nous voulons mieux comprendre la nature de l’énergie noire en utilisant une lentille gravitationnelle», ajoute Thomas Kitching, qui est également un des principaux scientifiques de la mission Euclid. «Les images des galaxies ont tendance à être déformées en raison de la présence de matière, de la même manière que le verre peut déformer la lumière.» Thomas Kitching explique qu’Euclid observera des galaxies lointaines et, par conséquent, le passé cosmique, afin de déterminer comment les champs gravitationnels déforment la lumière. Si cet effet peut être mesuré au fil du temps, Euclid pourrait alors être en mesure de déterminer comment la matière noire a évolué au fil du temps. Enfin, en observant la manière dont la matière noire se développe dans le temps, l’équipe d’Euclid espère pouvoir déterminer la nature même de celle-ci.
Calibrer la mission
C’est ici qu’intervient le projet EWC. «Les missions spatiales sont vraiment onéreuses», fait remarquer Thomas Kitching. «Lorsque cela est possible, les cosmologistes utilisent des télescopes au sol et des données provenant de différentes missions spatiales.» À cette fin, le projet EWC a entrepris de rassembler les données disponibles pour permettre d’affiner la mission Euclid. Il a réanalysé toutes les données du télescope Hubble(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) et recueilli de nouveaux ensembles de données provenant de sources telles que l’instrument PAUCam(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) sur les îles Canaries. «La résolution de Hubble est plus élevée que celle d’Euclid, mais sur une zone beaucoup plus petite – environ la taille de votre main tendue face au ciel», explique Thomas Kitching. «Euclid couvrira l’ensemble du ciel. Ainsi, là où il y a un chevauchement, nous pouvons calibrer les données Euclid avec les données à plus haute résolution de Hubble.» Les données de l’instrument PAUCam – une caméra multicolore – seront utilisées pour compléter les images en niveaux de gris produites par Euclid, offrant ainsi une meilleure résolution de couleurs.
Prêt pour le lancement
Le travail effectué par EWC s’est fait en parallèle avec les préparatifs du lancement d’Euclid. «Il est maintenant temps de préparer le lancement», déclare Thomas Kitching. «Il reste encore beaucoup à faire: développer des algorithmes pour analyser les données, effectuer des tests de résistance sur tout, etc.» Une fois lancé, Euclid fournira d’énormes quantités de données, affinées par le travail effectué par EWC. Thomas Kitching estime que la mission changera la vision que porte l’humanité sur l’univers. L’équipe du projet EWC a fait graver au laser sur le côté du télescope un poème et l’image d’une galaxie, constituées des empreintes digitales des chercheurs de l’équipe. «Nous essayons de transmettre aux générations futures une partie de l’humanité qui a présidé à cette mission», conclut-il. «Ce fut une entreprise collective.»