Placer la conception modulaire de satellites au cœur des futures opérations spatiales
L’écosystème spatial européen évolue rapidement, et de nombreuses opportunités découlent de la volonté de déployer des missions plus flexibles, durables et rentables. Cela permettrait aux PME et aux start-ups en particulier de contribuer avec des technologies innovantes liées à l’entretien en orbite, à la prolongation de la durée de vie des satellites et à la conception modulaire. Cela implique toutefois de nombreux défis. «Au-delà des difficultés purement techniques, la standardisation reste limitée et complexifie l’interopérabilité entre les systèmes. De plus, les nouvelles approches ne sont pas toujours compatibles avec les architectures de mission existantes, ce qui complique l’intégration et le financement, le classique problème de «l’œuf et de la poule», explique Pierre Letier de Space Applications(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre). Le projet SCHUMANN(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), soutenu par l’UE, coordonné par Pierre Letier et axé sur les composants de satellites, a été lancé pour faire progresser la modularité et la normalisation de l’écosystème spatial européen. SCHUMANN a développé deux éléments contributifs clés, dont un module satellite fonctionnel de ravitaillement (RTa) et une spécification de conception et de développement pour un kit de construction de vaisseau spatial (DSSCK). Une ambition supplémentaire a été réalisée pour faire mûrir l’interface matérielle HOTDOCK(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) dans une configuration de ravitaillement.
Conception de satellite modulaire et standardisée
Un module spatial fonctionnel (FSM pour Functional Spacecraft Module) est un bloc de construction standardisé qui fournit une fonction satellite spécifique telle que l’alimentation, la propulsion ou la communication. Ils sont standardisés (forme, interface similaires) et conçus pour une intégration, un remplacement ou une mise à niveau aisée, facilitant la conception et la maintenance des satellites. SCHUMANN a développé une preuve de concept de module de réservoir ravitaillable (RTa) pour stocker et transférer du carburant dans l’espace, permettant de ravitailler les satellites pendant leur mission et prolongeant ainsi la durée de vie des actifs spatiaux actuels. Le module a été développé à l’aide de composants de base dérivés d’anciens projets européens, tels que HOTDOCK (interface matérielle) et ESROCOS(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) (interface logicielle), pour assurer la compatibilité avec les futures missions de service européennes. Entre-temps, le kit de construction de vaisseau spatial (DSSCK) a été créé sous forme de lignes directrices et d’outils logiciels pour aider les développeurs à concevoir des modules de manière standardisée et compatible, même s’ils proviennent de différents fournisseurs. Pour ce faire, SCHUMANN a développé une plateforme logicielle baptisée RESONANCE.
Bénéficier aux futures missions et prolonger la durée de vie des satellites
SCHUMANN a réalisé plusieurs tests de validation, notamment pour le module de ravitaillement RTa, dont des tests fonctionnels de transfert de carburant, des tests de vide thermique et des tests de vibration. Pour le logiciel DSSCK, le projet a réalisé des tests internes à sec et des évaluations externes sur base de cas d’utilisation réalistes. «Nous avons démontré le potentiel des technologies de vaisseaux spatiaux modulaires, notamment en validant le transfert de fluide du RTa à 200 bars sans fuite et des connexions d’alimentation et de données fiables. Le logiciel RESONANCE de DSSCK a été bien accueilli et, avec quelques améliorations, pourrait contribuer à faire évoluer la conception et les opérations des satellites», confie Pierre Letier. SCHUMANN a également amélioré les aspects mécaniques, électriques et fluides de l’interface matérielle HOTDOCK, validant les performances dans des conditions pertinentes tout en étant intégré dans un module de réservoir de ravitaillement. «Nous avons démontré sa polyvalence, non seulement en tant que changeur d’outils pour bras robotisés, mais aussi en tant que solution fiable pour le transfert de gaz à haute pression, d’énergie électrique et de données, entre des modules dans l’espace», explique Pierre Letier.
Plus de durabilité, de compétitivité et d’autonomie dans l’espace
«Nos résultats contribuent à rapprocher l’Europe d’un avenir où les satellites ne seront plus à usage unique, mais évolutifs et réutilisables, réduisant à la fois les coûts et les déchets», ajoute Pierre Letier. Ce changement s’inscrit dans une tendance qui consiste à redéfinir la manière dont nous exploitons les satellites dans l’espace. Le projet contribue également à la compétitivité européenne en accélérant les cycles de développement et la vitesse de transition de la recherche vers le marché. À cette fin, la prochaine étape consistera à faire progresser la maturation technique, avec des démonstrations en orbite. «Bien que le RTa ne soit pas encore prêt pour le marché, les résultats sont proches de l’exploitation et suscitent déjà l’intérêt du secteur. Et fort des commentaires et de l’intérêt des bêta-testeurs du DSSCK, nous voyons un potentiel très prometteur pour une future exploitation commerciale», conclut Pierre Letier.