Cryoconservation de gamètes et d’embryons pour préserver des poissons menacés
Le Portugal compte 26 espèces de poissons d’eau douce, dont environ 70 % sont menacées d’extinction en raison de la perte d’habitat, de la détérioration de la qualité de l’eau, des espèces envahissantes et du changement climatique. Les populations de la péninsule ibérique sont en déclin depuis le milieu du XXe siècle. La cryoconservation, c’est-à-dire la collecte et le stockage de tissus animaux, offre un moyen de préserver ces espèces contre cette série de menaces. Dans le cadre du projet CRYO-FISH(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), financé par l’UE, une équipe de scientifiques a étudié la biologie de la reproduction des poissons d’eau douce endémiques (ceux qui n’existent qu’à un seul endroit sur Terre) et menacés du Portugal, afin de contribuer à leur conservation. CRYO-FISH a évalué pour la première fois la qualité des gamètes de cyprinidés menacés, développé de nouvelles techniques de test des gamètes et créé des protocoles de cryoconservation, jetant ainsi les bases d’une banque nationale de recherche génétique pour les espèces de poissons de tout le pays. «Ce projet entendait améliorer les connaissances de base sur la biologie de la reproduction de l’ichtyofaune d’eau douce et développer de nouveaux protocoles de cryoconservation pour les espèces indigènes les plus menacées de la péninsule ibérique», explique Victor Gallego(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), chercheur postdoctoral, qui a bénéficié d’une bourse MSCA au Centre des sciences de la mer CCMAR(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) au Portugal.
L’étude des gamètes chez les espèces menacées
Pendant deux ans, Victor Gallego a étudié et échantillonné plusieurs espèces de poissons d’eau douce menacées, dans les installations de l’aquarium Vasco da Gama(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) (site web en portugais) et dans certaines rivières de la région de l’Algarve, au Portugal. L’équipe a extrait des échantillons de sperme par une légère pression abdominale, et les paramètres de mouvement des spermatozoïdes ont été évalués pour la première fois chez quatre espèces, à l’aide d’un système d’analyse informatisé. Les résultats obtenus ont montré que les schémas cinétiques des spermatozoïdes étaient similaires pour les quatre espèces, avec des valeurs de motilité et de célérité élevées. En revanche, la longévité des spermatozoïdes était très variable selon les espèces, avec des longévités courtes d’environ 40 secondes pour Anaecypris hispanica et Squalius aradensis, et des longévités plus longues allant jusqu’à deux minutes pour Achondrostoma occidentale et Iberochondrostoma lusitanicum. L’équipe a ensuite analysé la forme des spermatozoïdes de chaque espèce et a constaté que les spermatozoïdes présentaient des tailles et des formes similaires à celles d’autres «fertilisants externes» appartenant à de vrais vairons.
Amélioration des techniques de cryoconservation de gamètes
L’équipe a également mis au point des techniques de préservation du matériel sexuel de ces quatre espèces. Ils ont dilué les spermatozoïdes dans un rapport de 1:9 avec un extenseur – un liquide préservant la capacité de fécondation des spermatozoïdes – et les ont conservés à 4 ºC. «Bien que les résultats obtenus soient inégaux entre les espèces étudiées, la dilution et l’extenseur utilisés ont généré des motilités supérieures à 40 % jusqu’au quatrième jour de stockage chez S. aradensis et I. lusitanicum, et jusqu’au premier ou deuxième jour chez A. hispanica et A. occidentale, respectivement», explique Victor Gallego. Enfin, les chercheurs ont également réalisé des essais de cryoconservation de gamètes sur l’espèce menacée. «Les échantillons cryoconservés présentaient une motilité nettement inférieure à celle des échantillons frais, mais certains protocoles ont généré des pourcentages acceptables de viabilité, d’intégrité de l’ADN et de motilité des spermatozoïdes chez certaines espèces», note Victor Gallego.
Aide à la conservation des poissons de la Méditerranée
Ce projet a été le premier à évaluer les caractéristiques reproductives des populations sauvages et captives de leuciscidés endémiques menacés de la péninsule ibérique, à décrire la cinétique des spermatozoïdes et à élaborer des protocoles pour la gestion des gamètes mâles dans le cadre d’un stockage à court et à long terme. Les résultats de CRYO-FISH ont fourni des outils nouveaux et utiles pour compléter la gestion et la conservation de programmes de reproduction ex situ(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) qui sont développés pour ces espèces menacées. En outre, il est important de souligner une chose, indique Victor Gallego: «De nouveaux projets se développent actuellement dans la région méditerranéenne, étudiant et appliquant les techniques utilisées dans le projet CRYO-FISH, dans le but de préserver d’autres poissons endémiques vivant dans les rivières et les estuaires de la Méditerranée.»
Mots‑clés
CRYO-FISH, eau douce, poisson, gamètes, sperme, ex situ, élevage, programmes, conservation
