Au-delà du silicium
Le silicium est de loin le matériau le plus utilisé pour réaliser des transistors, mais il est concurrencé par de nouveaux matériaux semi-conducteurs. La réduction de taille des circuits CMOS (complementary metal-oxide-semiconductor) approche des limites fondamentales de la technologie. En parallèle, les fondeurs de circuits sont en lutte permanente pour produire des dispositifs électroniques toujours plus légers, petits et efficaces. D'autres matériaux minéraux cristallins peuvent remplacer le silicium et son oxyde natif, mais leur adoption est ralentie par un manque de confiance dans leur capacité à réaliser des dispositifs nanoélectroniques fiables. Des scientifiques ont lancé le projet MORDRED (Modelling of the reliability and degradation of next generation nanoelectronic devices), financé par l'UE, pour aider les concepteurs et les ingénieurs à obtenir des prévisions exactes de durée de vie. Avec des transistors toujours plus petits, qui atteignent maintenant le nanomètre, le comportement des dispositifs commence à être dominé par la granulométrie des matériaux et par des effets de mécanique quantique. Les scientifiques du projet MORDRED voulaient préserver l'exactitude et la fiabilité de ces dispositifs. Pour cela, ils ont intégré des simulations 3D basées sur les caractéristiques physiques, avec des mesures expérimentales détaillées des propriétés du matériau à l'échelle quantique. Le but était de bien comprendre les causes de la dégradation des transistors CMOS, et leur impact sur les performances des circuits intégrés. Les chercheurs ont obtenu un cadre de simulation de la fiabilité, allant de l'échelle atomique jusqu'à celle du circuit. Ils ont utilisé un moteur Monte Carlo pour reproduire la dynamique des piégeages et dépiégeages, ce qui leur a permis de simuler la dégradation de l'oxyde. Les techniques de MORDRED se sont avérées efficaces et exactes pour modéliser les champs de force aux interfaces entre l'oxyde et le semi-conducteur, et entre l'oxyde et le métal. Elles comprenaient également des modèles mathématiques de processus non rayonnants à plusieurs phonons, d'instabilité et d'injections de porteurs, affectant le développement de certains défauts dans les dispositifs à semi-conducteurs. Par exemple, l'instabilité de la température de polarisation et le bruit aléatoire en créneau des CMOS résultent de phénomènes de piégeage sur des défauts. Les scientifiques de MORDRED ont mesuré les propriétés électriques et physiques de ces pièges dans des conditions particulières, ce qui leur a permis de les regrouper et de les comparer aux simulations, et donc d'améliorer les modèles. L'amélioration de la compréhension du comportement des pièges dans l'oxyde est essentielle pour gérer les problèmes de fiabilité comme la dégradation des porteurs chauds et le claquage diélectrique à dépendance temporelle. Les mesures expérimentales étendues, collectées dans une base de données de référence, ont permis de générer des connaissances substantielles et de corréler les signaux mesurés avec les causes des dégradations. De nouveaux matériaux semi-conducteurs ont déjà commencé à être utilisés pour améliorer les performances des CMOS et réduire leur consommation d'énergie. Les travaux de MORDRED contribueront à s'assurer que la prochaine génération de dispositifs nanoélectroniques conserve plus longtemps ces performances améliorées.
Mots‑clés
Silicium, fiabilité et dégradation, dispositifs nanoélectroniques, transistor, CMOS