Les processus moléculaires derrière l'adaptation
Les méthodes actuellement utilisées pour l'étude de l'adaptation reposent souvent exclusivement sur un gène candidat a priori ou sur la recherche de signaux de sélection à l'échelle de l'ADN. Mais cela peut donner lieu à une image lacunaire des processus à la base de l'adaptation. Tel a donc été l'objectif du projet ADAPT_EVOL (The molecular process and functional consequences of adaptation), qui a étudié l'adaptation provoquée par un élément transposable (ET) chez la mouche à fruits (Drosophila melanogaster). L'ET est une séquence ADN à même de changer de position au sein du génome, créant ou inversant ainsi parfois certaines mutations. Les scientifiques ont identifié les insertions d'ET adaptatifs dans les populations naturelles de différentes régions. C'est pourquoi le génome a été totalement séquencé sous la forme de 27 souches en provenance de Suède et 16 souches provenant du sud de l'Italie. Les analyses de ces 43 génomes, ainsi que celles de 141 souches provenant de Caroline du Nord (États-Unis) et 20 d'une population rwandaise ont permis aux chercheurs d'isoler 39 ET supposés adaptatifs. L'on a ainsi constaté que ces 39 ET étaient peu fréquents, voire absents dans la population rwandaise, alors qu'ils étaient très courants dans les populations hors Afrique. Cela suggère que ces ET particuliers jouent un rôle dans l'adaptation à l'environnement hors Afrique. Une hypothèse a été émise selon laquelle 15 des 39 ET réputés adaptatifs étaient plus fréquents suite à une sélection positive. D'autres études sur les mécanismes cellulaires et l'adéquation de six ET réputés adaptatifs ont révélé que cinq d'entre elles étaient impliquées dans les réactions au stress et deux autres dans la réponse au stress dû au froid. Par ailleurs, un ET était impliqué dans la réponse au stress dû à l'oxydation, un autre dû à la présence de métaux lourds et un dernier face au stress xénobiotique. Le projet ADAPT_EVOL a démontré que la capacité à faire face à un environnement stressant constituait un trait adaptatif important pour les populations naturelles de D. melanogaster. Les chercheurs ont constaté que 2 des 6 ET adaptatifs affectaient à la fois la structure et l'expression du gène voisin, alors que les trois ne concernent que l'expression. Le projet a par ailleurs montré que les ET représentent un outil efficace pour l'étude de l'adaptation dans les populations naturelles. Étant donné qu'ils se retrouvent chez presque tous les organismes étudiés jusqu'à présent, le rôle des ET dans l'évolution adaptative ne devrait pas se limiter aux seules mouches à fruits.
Mots‑clés
Adaptation, biologie évolutive, ADN, ADAPT_EVOL, élément transposable, Drosophila melanogaster, population, évolution adaptative