Un groupe de personnalités discute d'une stratégie de recherche sur la sécurité pour l'Europe
Le groupe des personnalités créé par la Commission européenne, qui comprend deux Commissaires, quatre parlementaires européens, des industriels et des spécialistes de la sécurité, s'est réuni pour la première fois le 6 octobre à Bruxelles afin d'entamer les discussions sur la formulation d'un programme de recherche européen en matière de sécurité. La Commission européenne a proposé une action préparatoire dans le domaine de la recherche sur la sécurité, qui serait dotée d'un budget de 65 millions d'euros pour la période de 2004 à 2006, afin d'ouvrir la voie à un véritable programme de recherche sur la sécurité à partir de 2007. Un aspect fondamental de cette coopération renforcée réside dans la coordination plus étroite entre la recherche civile et militaire. "L'Europe paye très cher la séparation artificielle, et exclusivement européenne, entre la recherche civile et militaire", a déclaré Philippe Busquin, Commissaire européen à la Recherche. "Les menaces nouvelles et plus complexes qui pèsent sur la sécurité, combinées aux aspirations croissantes des citoyens dans le domaine sécuritaire, exigent que nous adoptions une approche plus structurée et plus européenne concernant la recherche en la matière." Erkki Liikanen, Commissaire en charge des Entreprises et de la Société de l'information, a abondé dans ce sens en affirmant que "les nouvelles technologies ont pour effet qu'il est de plus en plus difficile d'établir une séparation entre la recherche civile et militaire". Il a cité plusieurs exemples de technologies qui sont aujourd'hui utilisées couramment, et dont l'élaboration a été financée initialement par la recherche militaire américaine, telles qu'Internet, l'interface "Windows-icons-pointer" et le système de positionnement global (GPS). La réunion inaugurale a servi à la discussion des principes et des priorités. Carl Bildt, ancien Premier ministre suédois et membre du groupe des personnalités, a indiqué qu'un accord général a été atteint à ce propos et qu'un très large soutien s'est manifesté au sein du groupe "en faveur de l'approche élémentaire adoptée par la Commission, ainsi que pour démanteler les barrières et relever de nouveaux défis". L'affectation des 65 millions d'euros s'effectuera plus tard, a précisé M. Bildt, lorsque les priorités seront bien établies. Elly Plooij-van Gorsel, élue néerlandaise au Parlement, qui siège également dans le groupe, souhaiterait qu'une priorité soit accordée à la recherche sur l'interopérabilité "non seulement entre les systèmes, mais également entre les organisations". Ayant exercé la vice-présidence de la commission parlementaire sur le système d'interception Echelon, Mme Plooij-van Gorsel parle par expérience lorsqu'elle souligne que "le point fort de l'UE n'est pas la coordination. (.) Nous comptons 14 agences de renseignements [dans tous les Etats membres à l'exception du Luxembourg] et elles ne coopèrent jamais." Elle a confié à CORDIS Nouvelles que "tout le monde se plaint de ressources trop maigres, mais les Etats membres ont montré qu'ils ne souhaitent pas instaurer une coordination". Au titre de l'action préparatoire, une série d'activités de recherche seront lancées sur des questions de sécurité en Europe, on mettra en place une consultation et une plate-forme capable de mener à un consensus afin d'élaborer une vision à long terme, et il sera démontré que la Communauté peut réagir par des mesures appropriées à quelques-uns des défis immédiats auxquels l'Europe est confrontée. Parmi les sujets spécifiques qui pourront être abordés figurent l'interopérabilité, la gestion des crises, la sécurité dans un environnement informatique réparti, la protection des infrastructures publiques et privées essentielles, la protection contre les incidents impliquant des substances biochimiques et autres, les technologies de reconnaissance des situations, et les moyens de riposte non létaux contre les actes terroristes. Aucun armement offensif ne sera développé dans le cadre de cette initiative. Bien que les pourcentages de financement de l'UE et de l'industrie n'aient pas encore été convenus, la Commission fournira sans doute une contribution supérieure à celle offerte aux projets individuels du Sixième programme-cadre. Cet écart se justifierait en ce que les recherches seront moins axées sur les technologies que sur les missions. M. Busquin a également tenu à mettre en exergue que "la politique de recherche européenne ne se résume pas aux programmes-cadres, elle est bien plus étendue. Nous souhaitons identifier les besoins de la recherche européenne dans le domaine de la sécurité." La prochaine étape en direction d'une stratégie européenne de recherche sur la sécurité sera franchie lors de la publication, en novembre, d'une communication de la Commission. Après son approbation, les premiers appels à propositions devraient être émis en 2004. Le groupe des personnalités remettra ses conclusions pour le printemps 2004. Dans l'intervalle, les résultats d'une étude menée par le Centre commun de recherche (CCR) de la Commission ont été publiés le 6 octobre. Ils font apparaître que les nouvelles technologies introduites depuis le 11 septembre ont fait appliquer des droits de fouille et de saisie et mettent en péril le droit des citoyens au respect de la vie privée. Le CCR recense un certain nombre de domaines dans lesquels une action politique pourrait s'imposer, tels que l'usurpation d'identité, les bases de données du secteur privé, les indicateurs de la sphère publique ou privée, et une réglementation spécifique à différentes technologies. Il remarque toutefois également que, bien que l'étude ait suscité quelques préoccupations, elle a également démontré que la technologie peut contribuer à rehausser la protection des données personnelles et à renforcer la transparence dans les processus de sécurité.