Les décideurs de l'UE annoncent une réévaluation de l'innovation européenne
Un changement d'attitude radical est nécessaire si l'on veut que l'Europe mette en valeur son potentiel compétitif: tel est l'avertissement que Mary Harney, présidente actuelle du Conseil Compétitivité et ministre irlandaise en charge des entreprises, a formulé au Sommet des entreprises européennes le 12 mars dernier. " Les dirigeants européens de la politique et des affaires doivent rapidement changer leur façon de penser car les politiques actuelles n'atteindront pas leurs objectifs ", a déclaré Mme Harney. Les lois et les réglementations ne rendront pas l'Europe compétitive, a-t-elle ajouté en avertissant que, au contraire, elles pourraient bien étouffer l'innovation. Évoquant un récent rapport du groupe de réflexion britannique Demos, Mme Harney a affirmé que le talent, la technologie et la tolérance avaient remplacé, en tant que composantes centrales de la compétitivité, des éléments traditionnels comme la disponibilité des ressources naturelles. " Sommes-nous vraiment tolérants vis-à-vis des conceptions et des idées nouvelles en Europe? Je dirais non, pas toujours ", a-t-elle avancé. Mme Harney a fait part des changements organisationnels qu'elle considère nécessaires pour améliorer la position de l'Europe. En premier lieu, il faudrait accroître la part du budget de l'UE consacrée à la recherche et à l'innovation, en particulier la recherche fondamentale. Cette mesure devrait aller de pair avec la création de meilleurs liens entre les universités et les entreprises, et avec une simplification des règles de participation aux programmes-cadres de recherche de l'UE. Deuxièmement, les décideurs devraient adopter une nouvelle approche de la législation conçue pour stimuler la compétitivité, une approche centrée sur ces deux questions: " En avons-nous besoin, et est-ce compétitif? " Mme Harney a également insisté sur le fait que la mise en ouvre de la directive sur les services et l'adoption d'une communication sur la mobilité des chercheurs revêtaient une importance vitale pour la relance de la compétitivité. " Lisbonne est le seul agenda à suivre et nous nous en sommes détournés, mais nous pouvons encore mener à bien ce programme si nous nous faisons vite. [...] La présidence irlandaise tirera profit du Conseil de printemps pour revitaliser l'agenda de Lisbonne ", a promis Mme Harney aux délégués. Les participants au sommet ont ensuite assisté à une présentation de David White, directeur de la politique d'entreprise à la DG Entreprises de la Commission, du prochain plan d'action de la Commission en matière d'innovation. M. White a précisé aux délégués que ce plan d'action avait été conçu pour libérer le potentiel d'innovation de l'Europe, non seulement dans les secteurs de haute technologie, mais dans tous les secteurs et toutes les entreprises. M. White a annoncé que le plan d'action serait centré sur trois grands domaines: la régulation, le savoir et les ressources. " Une bonne régulation instaure un climat de confiance propice à l'innovation, tandis qu'une mauvaise régulation peut étouffer cette dernière peu à peu ", a-t-il commencé. La régulation, selon lui, est essentielle pour trouver un équilibre entre les préoccupations du public et les opportunités commerciales, et la question des organismes génétiquement modifiés (OGM) illustre à quel point cet équilibre est difficile à atteindre. Et d'ajouter: " Nous n'avons pas besoin d'une absence de régulation, mais bien d'une bonne régulation ". En second lieu, ce plan d'action se focalisera sur la création d'une " place de marché du savoir ", où la propriété intellectuelle sera protégée et exploitée, où le transfert de technologie sera encouragé, et où les particuliers et les entreprises seront mis en réseau dans des groupes ouverts à la coopération et aux nouvelles idées. Enfin, ce plan d'action s'efforcera de veiller à ce que l'on mette en place des ressources appropriées pour l'innovation. On entend ainsi combler l'actuel fossé du marché du capital-risque, surmonter les disparités régionales dans le domaine de l'innovation, fournir une aide publique claire et simple, investir dans les compétences des gens et leur offrir un apprentissage tout au long de la vie. Pour réaliser les objectifs du plan d'action en matière d'innovation, M. White a déclaré: " Les gouvernements doivent s'entendre. La plupart des activités d'innovation sont menées à l'échelle régionale ou nationale mais, même si l'innovation est surtout un phénomène local, le cadre dans lequel elle se développe est un cadre commun. " M. White a révélé qu'un processus de consultation de deux mois relatif au plan d'action devrait être lancé dans les prochaines semaines, de manière à permettre à la Commission d'adopter le plan en juillet. Il a conclu en invitant les entreprises à contribuer à ce processus de consultation.