L'ambre opaque sous un jour nouveau grâce à l'ESRF
Les paléontologues se montrent très consciencieux dans leur quête de la compréhension de l'histoire de la vie sur Terre. À cet égard, l'ambre, dont l'échantillon le plus ancien remonte à l'ère du carbone, il y a 345 millions d'années, constitue pour eux une importante source d'informations fossiles. L'Installation européenne de rayonnement synchrotron (ESRF, European Synchrotron Radiation Facility) met désormais à la disposition des paléontologues, qui utilisent déjà des techniques de microscopie classiques, un nouvel outil pour étudier l'ambre opaque: le rayonnement synchrotron. Grâce au synchrotron, des scientifiques de l'ESRF et de l'université de Rennes en France ont découvert 356 fossiles animaux dans 2 kilos d'ambre opaque provenant de sites crétacés moyens de la région de la Charente, en France. Ces fossiles animaux, âgés de 100 millions d'années, incluent des mouches, des guêpes et des araignées. Aux fins de l'étude, le groupe a imagé 640 morceaux d'ambre de cette région française et malgré la taille minuscule de la majorité des organismes, les scientifiques ont pu identifier les familles de 53% des échantillons. "La petite taille des organismes emprisonnés dans l'ambre nous laisse penser que les animaux plus grands parvenaient à s'échapper de la résine avant d'être piégés", explique Malvina Lak, paléontologue à l'université de Rennes et membre de l'équipe de recherche. "Les animaux plus petits étaient capturés plus facilement." L'ambre opaque représente plus de 75% de l'ambre retrouvée sur des sites de la période crétacée (de 135 millions à 63 millions d'années), époque à laquelle ont disparu les dinosaures et sont apparus les insectes modernes et les plantes à fleurs. L'étude de ce type d'ambre s'est toutefois avérée difficile dans la mesure où il est impossible de déceler la présence de fossiles à l'�il nu. Pour découvrir ce qui se cachait à l'intérieur de la pierre, Mme Lak et ses collègues, de même que le Dr Paul Tafforeau de l'ESRF et des chercheurs du Musée national d'histoire naturelle de Paris, ont utilisé une technique d'imagerie par rayonnement synchrotron: la microradiographie à contraste de phases par propagation. Cette technique permet à la lumière d'atteindre l'intérieur de cet ambre foncé. "Les chercheurs tentaient d'étudier ce type d'ambre depuis de nombreuses années avec un succès relatif, voire nul", explique le Dr Tafforeau. "C'est la première fois que nous pouvons vraiment voir et étudier les fossiles qu'il renferme." Les scientifiques ont utilisé la même technique dans le cadre d'une deuxième étude pour établir la structure 3D des animaux à plumes découverts dans l'ambre translucide. D'après les scientifiques, l'étude de ces fragments est importante dans la mesure où l'on possède peu d'informations sur les dinosaures à plumes et le lien manquant avec les animaux à plumes modernes. L'étude apporte les premières preuves fossiles de l'existence d'une phase intermédiaire dans la diversification évolutionnaire des animaux à plumes. "L'ambre opaque renferme encore de nombreux autres secrets sur la vie passée de notre planète et l'utilisation de sources de synchrotron de troisième génération continuera à jouer un rôle important en vue de leur divulgation", déclare Mme Lak. L'ESRF, situé à Grenoble, en France, est une installation conjointe soutenue et partagée par 18 pays européens. L'installation agit comme un véritable aimant pour des milliers de chercheurs, dont des biologistes, des géophysiciens et des archéologues, désireux de travailler dans un environnement scientifique de première classe.
Pays
France