Des journalistes conseillent les coordinateurs de projet sur les meilleurs moyens d'approcher la presse d'affaires
La récente conférence intitulée "CER 2005 - Communicating European Research 2005" (Communiquer la recherche européenne) a montré qu'il existe deux motifs pour que les milieux scientifiques accentuent leurs efforts de communication tout en élargissant leur audience: premièrement, il leur incombe d'informer les contribuables quant à la manière dont leur argent est dépensé en recherche financée par des fonds publics (et éventuellement s'assurer de leur soutien pour d'autres nouvelles initiatives de recherche) et, deuxièmement, la communication a un rôle à jouer dans l'introduction des nouvelles technologies sur le marché. Etant donné le défi que représente pour l'Europe la transformation des résultats de la recherche en succès commerciaux, c'est sur ce deuxième rôle que la session organisée par CORDIS dans le cadre du programme CER 2005 était principalement centrée. La presse d'affaires spécialisée vise les managers et dirigeants d'entreprises susceptibles d'être intéressés par certains résultats de recherche de projets européens, pour les utiliser dans des produits et services commerciaux. Lors de la session, un groupe de rédacteurs en chef de revues d'affaires de toute l'Europe a donné des conseils de première main et répondu aux questions des participants sur la meilleure manière de traiter avec ce secteur particulier des médias. Marta Ribele, directrice de l'information de "Dienas Bizness", un quotidien d'affaires letton, a commencé par expliquer pourquoi les nouvelles scientifiques ne sont pas très cotées dans la presse. La principale raison en est que les journalistes reçoivent peu d'informations bien présentées, ceci étant dû, partiellement du moins, à la culture scientifique elle-même, qui est rarement axée sur les affaires. Elle a souligné que les médias sont, par nature, principalement intéressés par les faits basés sur des personnes ou sur l'argent, une caractéristique dont il faut tenir compte pour juger si des renseignements sur la recherche sont présentés de manière intéressante. Les journalistes sont aisément tombés d'accord quant à la manière de surmonter ces obstacles. Michaela Stipsits, rédactrice en chef de "Business People", un supplément du quotidien d'affaires autrichien "Wirtschaftsblatt", a souligné l'importance de la flexibilité et de la créativité lorsqu'il s'agit de repérer les opportunités de transcrire les histoires de science en histoires d'affaires. Les questions d'actualité, comme la grippe aviaire, peuvent augmenter l'intérêt des milieux d'affaires pour des domaines de recherche tels que les vaccins, tandis que les synthèses de fin d'année peuvent être une occasion de contribuer aux prévisions en matière de technologie et de présenter de nouveaux développements. Les membres du groupe de rédacteurs ont également donné des conseils pratiques sur la façon de traiter directement avec les journalistes. La plupart d'entre eux étaient d'accord pour dire que la bonne approche consiste tout d'abord à envoyer une introduction par e-mail, puis d'en assurer le suivi par un appel téléphonique concis et pertinent. Toutefois, il est inutile de se perdre en longs discours lorsque le temps presse, ont-ils convenu. Lorsqu'on a réussi à attirer l'attention d'un rédacteur en chef, l'interview, directe ou par téléphone, peut être suivie d'une synthèse d'une page destinée à clarifier et résumer les points clés qui ne doivent pas être oubliés. Il faut aussi indiquer les coordonnées de contact, telles que numéro de téléphone et adresse web, qui permettront au journaliste de rechercher des détails à sa convenance. Marta Ribele a surpris certains participants lorsqu'elle a suggéré qu'approcher proactivement un journaliste pouvait même impliquer le fait de lui envoyer deux fois les mêmes informations si l'on est convaincu qu'elles présentent un réel intérêt. Les suggestions concernant l'approche d'une question, des idées d'articles ou de suppléments sont généralement bienvenues également, a ajouté Michaela Stipsits. Tous les rédacteurs en chef reconnaissent qu'il est important de se mettre à la place du journaliste, surtout en matière de délais. Lorsqu'on réfléchit à la manière dont on va vendre un article, la première démarche importante est de rechercher avec soin les publications que l'on veut cibler. Là encore, la flexibilité est cruciale, et si une revue n'est pas intéressée à un moment donné par une avancée dans le secteur des biotechnologies, le fait qu'elle recherche ou ait obtenu des capitaux-risques peut s'avérer intéressant pour un article sur le capital-risque, par exemple. On peut aussi soigner ses contacts journalistiques en montrant sa disponibilité à répondre aux appels et questions des journalistes lorsqu'ils recherchent un point de vue scientifique sur un autre sujet, a suggéré Michaela Stipsits. Les journalistes et rédacteurs prennent leurs décisions en fonction des sujets qui intéresseront leurs lecteurs et en tenant compte de la nécessité d'attirer suffisamment leur attention pour les persuader de prendre le temps de lire l'article. Ainsi, la presse écrite est plus exigeante, mais en revanche elle peut avoir un impact plus important. C'est pourquoi les participants ont estimé que les publications traditionnelles sur papier conservent un avantage sur les médias diffusés par Internet. Luisa Minoli, qui représentait "Innovare", la revue de la Confédération italienne des PME, a traité certaines questions spécifiques liées à la possibilité de toucher les petites entreprises, une audience cruciale pour la transformation de la recherche en innovation. Elle a mis en lumière la diversité des médias d'affaires, soulignant que de nombreuses revues spécialisées ciblant les dirigeants de PME sont intéressées par un travail en étroite collaboration avec les chercheurs afin de présenter à leurs lecteurs des informations détaillées sur les applications et les bénéfices des nouvelles technologies. L'un des conseils pratiques issu de la discussion générale est que les chercheurs ou les coordinateurs de projet auraient tout intérêt à s'abonner à un service de RP pour entreprises. En effet, comme ces services disposent déjà d'une liste de diffusion pour la plupart des publications d'affaires pertinentes, ils auront déjà fait la majeure partie du travail en transmettant le communiqué de presse du projet au journaliste directement concerné. En ce qui concerne les approches à plus long terme, plusieurs participants ont convenu avec Luisa Minoli qu'il serait intéressant de former des partenariats plus étroits entre sociétés, universités, associations d'entreprises et canaux d'informations. De nombreux participants ont convenu que l'approche expérimentale consistant à "impliquer" les journalistes en leur donnant l'occasion de passer beaucoup de temps dans les laboratoires et parmi les chercheurs au travail pourrait beaucoup contribuer à améliorer à l'avenir la place des sciences dans les médias.