Les inventrices semblent stimuler les innovations médicales destinées aux femmes
Les équipes de recherche comprenant des femmes ont tendance à produire des brevets ciblant les femmes, selon une nouvelle étude. «Nous constatons de fortes corrélations entre les inventrices et les innovations axées sur les femmes», déclare Sampsa Samila, le chercheur qui a mené ces recherches avec le soutien des Actions Marie Skłodowska-Curie. «L’effet est plus marqué lorsque les chercheuses occupent des postes de direction au sein de leurs équipes ou qu’elles travaillent dans une université, ce qui suggère que les femmes choisissent d’innover pour les femmes», ajoute le professeur associé de gestion stratégique à l’IESE Business School, qui fait partie de l’université de Navarre, en Espagne. «Le droit d’inventer semble lié à l’identité des bénéficiaires des inventions.» L’équipe de Sampsa Samila a travaillé avec des collègues de la Harvard Business School, aux États-Unis, et de l’université McGill, à Montréal, au Canada. Pendant les 24 mois du projet GEISIE, les chercheurs ont utilisé des algorithmes pour analyser des centaines de milliers d’inventions médicales en fonction du genre de leurs inventeurs et du genre des bénéficiaires de ces inventions. Grâce à des algorithmes de correspondance de noms, l’équipe a été en mesure de prédire le genre des inventeurs. En utilisant le système d’indexation des textes médicaux de la National Library of Medicine, ils ont réussi à déceler la nature des inventions et à savoir si elles concernaient des maladies et des conditions médicales spécifiquement féminines. La taille de la base de données, qui couvre l’ensemble des innovations médicales brevetées de 1975 à 2010, a permis aux chercheurs de tester différents types de corrélations et d’examiner l’évolution de la proportion de femmes effectuant des recherches dans différentes catégories de brevets au fil du temps. «Nous avons généralement constaté une augmentation des innovations destinées aux femmes qui reflète celle du nombre d’inventrices. Par ailleurs, les domaines où il y a davantage d’inventrices occupant des postes de direction comptent davantage d’inventions destinées aux femmes», observe Sampsa Samila.
La parité pour stimuler l’innovation
Les chercheurs ont partagé leurs résultats dans un article intitulé «Inventor Gender and the Direction of Invention» (le genre de l’inventeur et la conduite des inventions), publié dans AEA Papers and Proceedings. Il est nécessaire de poursuivre les recherches pour prouver que les chercheuses contribuent à résoudre le problème du sous-investissement apparent concernant les maladies qui touchent plus particulièrement les femmes. La corrélation entre les équipes de recherche comportant des femmes et celles produisant des brevets axés sur les femmes, qui dépasse de 5 à 20 % la base de référence, apportera toutefois des arguments aux organisations qui militent pour des politiques visant à encourager les inventrices. Alors que des progrès sont accomplis en encourageant davantage de filles à s’orienter vers les disciplines liées aux STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques), seuls 11 % des inventeurs sont des femmes, selon le Rapport de l’UNESCO sur la science: vers 2030. «Un calcul rapide et approximatif suggère qu’une représentation plus paritaire des inventeurs aurait débouché sur des milliers d’innovations supplémentaires pour les femmes», indique Sampsa Samila. Il rassure les hommes en précisant qu’une meilleure parité chez les inventeurs ne se traduirait pas par un nombre plus restreint d’innovations destinées aux hommes. Il insiste sur le fait que des recherches antérieures ont montré qu’une sous-représentation avait tendance à entraîner une basse globale de l’innovation. «D’un point de vue global, un plus grand nombre d’inventrices pourrait bien conduire à un plus grand nombre d’innovations», fait remarquer Sampsa Samila. «Une disparité du marché du travail pourrait conduire à un déséquilibre sur le marché des produits.»
Mots‑clés
GEISIE, sujets liés aux STIM, inventeurs féminins, genre